La coopérative culturelle «Dima Cinéma» a initié un programme de réflexion autour de la représentation de la femme au cinéma, intitulé « Ramchet 3in – رمشة عين », battement de cil. Au terme de la première phase de ce programme, qui s’est déroulé en ligne, débats professionnels, discussions publiques, et exposition photographique, ont tenté de déconstruire les représentations «habituelles» des violences à l’image.
«Dima Cinéma» est une coopérative culturelle créée par Leila Aoudj et Amine Hatou en 2019. Amine Hatou est réalisateur et fondateur du « Bejaia Film Laboratoire ». Leila Aoudj, pour sa part, accumule une expérience de plusieurs années en tant que directrice artistique des rencontres cinématographiques de Bejaia (RCB). Elle est également productrice et fait ses premiers pas dans la réalisation. Le programme « Ramchet 3in – رمشة عين » est né d’un constat, affirme Leila Aoudj.
« Cette réflexion que nous avons engagée autour de la représentation de la femme à l’image est née d’un constat. Nous avons tous vu ces photos de femmes victimes de féminicides qui circulaient sur le net. Personnellement en voyant ces images j’ai été outrée, et je me suis demandée ce que les victimes auraient pensé de ces images qui les représentent. Il y a ceux qui pensent que montrer des images d’une grande violence aide à interpeller l’opinion publique, et le problème sera pris au sérieux, et d’autres qui voient en cela une atteinte à la dignité des victimes. Le débat s’imposait de lui-même. Nous avons donc, avec Amine, décidé d’en discuter avec des professionnels de l’image, des militantes, des actrices et bien d’autres à travers des ateliers en ligne », souligne Leila Aoudj.
Les deux rencontres en ligne étaient destinées à des professionnels de l’image, acteurs, réalisateurs, vidéastes, photographes, techniciens, Ciné-club, associations culturelles ou humanitaires, collectifs informels…etc.
La thématique du premier atelier a porté sur « les nouvelles figures de femmes dans le cinéma algérien contemporain » animé par Salima Tenfiche doctorante en études cinématographiques à l’Université de Paris.
« Il y a des réalisateurs qui vont faire des films où les violences sont réellement représentées et d’autres qui vont passer par des dispositifs plus subtiles, d’où l’importance de cette discussion qui nous a permis d’avoir les avis des réalisateurs sur les deux représentations », ajoute Leila.
Le second atelier a été dédié à la programmation cinéma sous le titre : « à la recherche des films qui guérissent” destiné aux ciné-clubs et animé par Kahina Zina et Sonia Ahnou.
« L’idée était de discuter de la manière d’organiser une programmation cinématographique liée aux thématiques sur les violences faites aux femmes ».
« 20 regards, 20 نضرة »
Une campagne digitale a été initiée dans le cadre du programme « Ramchet 3in – رمشة عين ». elle a été baptisée « 20 regards ». Il s’agit d’une campagne de médias sociaux basée sur 20 photographies qui questionnent la représentation des violences faites aux femmes.
Deux séries photographiques ont été réalisées par deux artistes photographes : Sonia Merabet et Abdo Shanan.
« Les deux photographes ont réalisé une série de 10 photographies chacun.
Les images de Sonia Mérabet étaient accompagnées de textes de la journaliste Nesrine Dahmoun et Abdo Shannan s’est inspiré du livre blanc du réseau Wassila. Un recueil de témoignages de femmes victimes de violences. Ces photographies ont fait l’objet d’une campagne sur les réseaux sociaux », précise Leila.
Les photographies de Sonia Merabet et Abdo Shannan sont actuellement exposées à l’espace rhizome jusqu’au 8 mars.
Ce volet a également compté des conversations en ligne sous la thématique « Éthique de l’image dans le cinéma documentaire et choix de publication dans les réseaux sociaux » avec la participation de Habiba Djahnine, de Wiame Awres et modérée par Salima Tenfiche.
« La participation de Wiame Awres était particulièrement importante. Wiame Awres a lancé le site Féminicide DZ avec Narimane Mouaci Bahi. Ces deux militantes recensent les féminicides en Algérie à travers leur site Feminicides DZ. Leur expérience est intéressante dans la mesure où elles ont élaboré une charte par rapport à leur gestion des images sur les réseaux sociaux. Les images et les informations sur les victimes qu’elles diffusent sont traitées de telle manière à préserver les victimes et leur entourage », explique Leila Aoudj.
Une deuxième phase du projet « Ramchet 3in – رمشة عين » est en cours d’élaboration. Ce projet sera « physique » et en présentiel.
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