Souheil Guessoum, président du Syndicat national du patronal citoyen du numérique, a critiqué le retard de l’Algérie dans le domaine du digital.
Il a expliqué que la majorité des entreprises algérienne sont toujours au premier stade : « infrastructures basiques manuellement coordonnées ». « Dans le monde, la plupart des entreprises sont au stade avancé de management automatisés, ressources utilisées d’une manière dynamique, intelligence artificielle fortement exploitée… », a-t-il indiqué, samedi 13 novembre, lors de la rencontre intitulée « La relance, c’est maintenant », organisée à l’hôtel El Aurassi, à Alger, par la Confédération algérienne du patronat citoyen (CAPC).
Selon lui, il y a un manque d’exploitation et de prioritisation des systèmes d’information en Algérie. « Les TIC représentent de 6 à 7 % du PIB au Maroc, 7,5 % en Tunisie, 3 à 4 % en Algérie. La moyenne mondiale est de 15,5 %, 21,6 % aux Etats Unis, 30 % en Chine », a-t-il dit soulignant que la bande passante est toujours faible en Algérie malgré les améliorations constatées dernièrement.
Il a parlé aussi de la faible interconnexion des différents services. « Les Algériens possèdent une carte biométrique. Le moment est venu d’utiliser le numéro d’identification unique pour chaque citoyen. Si ce numéro n’est pas utilisé, à quoi sert-il d’utiliser la carte biométrique ? », s’est-il interrogé.
Des ordinateurs surtaxés à l’importation
Il a évoqué aussi la surtaxation des produits informatiques en Algérie. « Est-il normal que dans les pays voisins, on paye 2,5 % de taxe sur les ordinateurs alors qu’en Algérie la taxe intérieure de consommation (TIC) est de 30 % et la TVA de 19 %. A cela s’ajoutent, les droits de douanes variant entre 15 et 30 %. Comment acheter un ordinateur ou un serveur dans ces conditions ? Et comment peut-on être compétitifs », s’est-il demandé.
Souheil Guessoum, qui est également CEO d’Alpha Computer, a critiqué la » forte régulation », « l’omniprésence de l’ARPCE (Autorité de Régulation de la Poste et des Communications Électronique) », « les blocages de l’ARPCE »… »Pour importer un pointeur fonctionnant au wifi, il faut une autorisation de l’ARPCE. Une autorisation qui pourrait prendre un mois. Soyez sérieux, on ne peut attendre des autorisations qui parfois arrivent après une année ou deux années. Dans le domaine des technologies, cela est inacceptable puisque les choses évoluent rapidement » a-t-il dénoncé.
Et de poursuivre : « il y a aussi un problème culturel car on n’imagine pas que ce qu’a fait Walmart et Dell, aux Etats Unis, est possible en Algérie. Oui, c’est possible. Nous devons faire en sorte que les systèmes d’information numérique soient la base de notre développement. Sans cela, nous n’aurons pas ce développement ».
« Créer une école de cyber sécurité »
Les Algériens peuvent, selon lui, exceller dans certains domaines comme les logiciels. « Nous avons des jeunes ingénieurs qui ont beaucoup de capacités. Nous savons développer et coder des logiciels.Laissez ces jeunes innover, créer ! », a-t-il plaidé.
« Dans la situation politique actuelle, l’Algérie doit se défendre. Il faut former des jeunes spécialisés en cyber sécurité sur tous les systèmes. Nous devons créer une école de cyber sécurité en Algérie. Nous en avons besoin », a-t-insisté.
Il a critiqué le non développement des centres d’appels en Algérie contrairement aux autres pays maghrébins. « Pour ouvrir un centre d’appel en Algérie, il faut vingt autorisations. En Algérie, nous ne pouvons pas importer de logiciels. Aussi, les entreprises utilisent-elles des logiciels piratés vulnérables », a-t-il expliqué.
Il a précisé qu’un nouveau texte de loi classe l’importation des logiciels parmi « les services ».
« Au niveau de la banque, quand vous demandez une domiciliation, on vous précise que les services sont dans la case « autres ». Et, la Banque d’Algérie a interdit toute importation de produits classés dans la case « autres ». On ne peut même pas acheter Windows ou un antivirus. La loi doit être changée », a déclaré Souheil Guessoum à la presse.
Mettre les documents en ligne
Selon lui, seul le numérique permettra le ciblage des subventions. « Les procédures d’importation et d’exportation, le registre de commerce, procédures d’investissement, agréments…Tous ces documents doivent être en ligne. Nous voulons avancer… », a-t-il soutenu.
Il a expliqué que le fonctionnement et le management des entreprises a changé avec le digital, citant l’exemple du géant américain de distribution Wal-Mart, « qui a considérablement réduit ses coûts en adoptant le numérique », et ceux de Dell, le fabricant d’ordinateurs, et Starbucks, une chaîne de cafétérias.
Ces trois firmes étaient les pionniers dans le domaine du passage au numérique.
« Aujourd’hui, nous parlons d’intelligence artificielle, de machine learning, de natural data processing, de réalité augmentée, de cryptomonnaie, d’internet du comportement, de Privacy-enhancing technologies (technologies de protection de la vie privée), anywhere operations (opérations n’importe où), de clouds, d’automatisation, de cyber sécurité et de big data. Il y a des milliards d’octets à analyser et transformer en informations, 34 milliards d’objets connectés, 1,6 milliards de smartphones vendus par an », a-t-il détaillé.
La Cryptomonnaie interdite en Algérie
Selon lui, la plateforme Netflix consomme 15 % de la bande passante mondiale d’internet. Il a expliqué que de théories évoquent « un effondrement » d’internet et « une saturation des réseaux » les prochaines années.
« Je ne crois pas à ces théories. Je pense que la technologie ne va cesser d’évoluer et que nous allons nous réunir pour parler sur l’environnement et diminuer l’empreinte énergétique », a-t-il noté.
Il a regretté que la crypto-monnaie soit encore interdite en Algérie. » C’est un point qu’il va falloir étudier. Dans quelques années, il n’y aura plus de monnaie physique. Il n’y aura que de la monnaie virtuelle », a-t-il prévu.
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