10 décembre, Journée Internationale des droits humains : n’oublions pas les droits des femmes (contribution)

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10 décembre, Journée Internationale des droits humains : n’oublions pas les droits des femmes (contribution)
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Contribution de Mme Blerta Aliko,

Représentante Résidente du Programme des Nations Unies en Algérie (PNUD)

Aujourd’hui, le 10 décembre, nous célébrons la Journée internationale des Droits Humains. C’est aussi le jour où prend fin la campagne mondiale des 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre à l’égard des femmes et des filles.

Tout au long de cette campagne de sensibilisation, institutions gouvernementales, organisations de la société civile et citoyen-nes ont travaillé de concert et appelé d’une seule voix à une plus grande mobilisation, à une meilleure prévention et à l’intensification des efforts pour lutter contre ce phénomène.

Cette célébration est aussi l’occasion de rappeler que la violence à l’égard des femmes et des filles constitue encore et toujours, en dépit des efforts pour y mettre fin, l’une des violations des droits humains les plus répandues, les plus persistantes et les plus dévastatrices dans le monde, présente tant dans l’espace public que privé. A l’échelle mondiale, et selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), une femme sur trois a subi des violences physiques ou sexuelles de la part d’un partenaire intime ou d’une autre personne, tandis que 137 femmes sont tuées chaque jour dans le monde par leur partenaire intime ou par un membre de leur famille. Ces chiffres vertigineux datent de 2018, et ne reflètent donc pas l’augmentation des violences enregistrée ces deux dernières années, suite à la pandémie de Covid 19…

La violence à l’égard des femmes et des filles demeure également l’une des moins signalées, en raison de l’impunité, du silence, de la stigmatisation et du sentiment de honte qui l’entourent. Pourtant, la persistance de cette violence et ses conséquences néfastes continuent d’être l’un des principaux obstacles à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et ce, partout dans le monde.

 Des progrès, mais…

En Algérie, d’importantes mesures juridiques ont été prises ces dernières années pour renforcer la reconnaissance et la criminalisation de ces violences. La violence familiale à l’égard des femmes et le harcèlement sexuel sont désormais pénalisés.

Néanmoins, un fossé persiste entre les textes de loi, leur application et les normes sociales. En dépit de ces progrès législatifs, la tolérance sociale à la violence persiste, même parmi les femmes. Les résultats d’une grande enquête réalisée en 2019 auprès des femmes algériennes par le Ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme Hospitalière, en partenariat avec deux agences des Nations Unies – le FNUAP et l’UNICEF – révèlent en effet que 41,7% d’entre elles (âgées de 15 à 49 ans) justifient la violence physique et 64,6% la violence verbale d’un mari envers sa femme[1].

Une réponse coordonnée pour une lutte efficace contre cette forme extrême de discrimination

La violence à l’égard des femmes est une forme de discrimination, et la manifestation la plus extrême des relations de pouvoir historiquement inégales entre les hommes et les femmes. Elle prend racine et vient s’ajouter à d’autres formes de discriminations plus indirectes dont souffrent les femmes, comme la dépendance économique, les obstacles à leur participation politique et leur accès aux postes de responsabilité en général, les stéréotypes sexistes véhiculés dans la société, etc.

Pourtant, cette violence n’est pas inévitable, et elle peut et doit être combattue. Pour ce faire, la mise en place un cadre juridique et législatif solide qui ne tolère aucune forme de violence, accompagné de politique publiques indispensables à son application concrète, est plus que nécessaire. Mais lutter efficacement contre cette violence et les autres formes de discriminations ne peut se faire que par la loi. Cela nécessite une réponse coordonnée et intersectorielle, qui implique l’ensemble des secteurs et des acteurs de la société.

Dans plusieurs pays, le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et ses partenaires travaillent pour la mise en œuvre d’une telle réponse, qui s’attaque aux causes profondes de cette violence pour transformer les normes sociales préjudiciables lui permettant de persister. Ces normes ne sont pas seulement préjudiciables aux femmes, mais à la société dans son ensemble. C’est pourquoi, pour être efficaces, ces initiatives doivent impliquer activement les hommes et les garçons dans la lutte contre les stéréotypes et la promotion d’autres formes de masculinités, plus positives. Ces initiatives cherchent aussi à appuyer des solutions concrètes et innovantes dans tous les domaines (éducation, emploi, santé, etc.) pour permettre aux femmes et aux filles d’accéder pleinement à leurs droits sociaux, économiques et politiques, et réaliser ainsi l’atteinte des ODD, et notamment de l’ODD 5 sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles.

L’Algérie a accompli des progrès substantiels en matière d’égalité femmes-hommes au cours des 20 dernières années et ce, dans plusieurs domaines (notamment en ce qui concerne l’éducation des femmes ou leur santé). Néanmoins, de nombreux défis persistent (comme leur participation limitée au marché du travail, un taux de chômage féminin assez élevé, une représentation politique en baisse, etc.).

En cette journée hautement symbolique, le PNUD se félicite de la volonté politique affichée par les plus hautes autorités de l’Etat pour mieux inclure ces préoccupations dans les politiques publiques. Le PNUD appelle ainsi l’ensemble de ses partenaires en Algérie à soutenir les efforts qui y sont fournis pour rendre réels les droits garantis aux femmes et aux filles par la Constitution, et contribuer ainsi à faire avancer les droits humains.


[1] MICS 2019, pour l’une des raisons suivantes : si elle sort sans le lui dire ; si elle néglige les enfants ;  si elle se dispute avec lui ; si elle refuse d’avoir des rapports sexuels avec lui ; si elle brûle la nourriture ; si elle lui manque de respect ; si elle refuse de lui donner son salaire ; si elle refuse de quitter son travail ; si elle manque de respect à ses parents (à lui).

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