Les activités de mercenaires soudanais « en Libye ont été la principale source de financement (en 2021) de la plupart des mouvements au Darfour » dans l’ouest du Soudan, affirme un rapport annuel de l’ONU publié vendredi qui met en cause les Emirats arabes unis.
Rédigé par les experts de l’ONU chargés de contrôler l’embargo sur les armes imposé au Soudan pour le compte du Conseil de sécurité, ce document affirme qu’il a continué l’an dernier à être violé, « avec le transfert d’armes et d’autres types de matériel militaire au Darfour ».
Le rapport s’étend notamment sur les milliers de mercenaires soudanais présents en Libye au service de l’autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL) contrôlée par le maréchal Khalifa Haftar.
Ces mercenaires sont issus de mouvements signataires et non-signataires de l’Accord de paix de Juba, conclu en octobre 2020, précisent les experts, en indiquant ne pas être en mesure d’en chiffrer le nombre total. « La plupart des groupes armés du Darfour ont continué à travailler pour l’Armée nationale libyenne en Libye » l’an dernier « en sécurisant des zones et en tenant des postes de contrôle », affirment les experts.
« En contrepartie, les cinq principaux mouvements (ALS-MM, GSLF, ALS-CT, ALS-AW et SRAC) recevaient des versements (d’argent) et un soutien logistique. Plusieurs sources au sein des mouvements ont déclaré que l’argent et le soutien ont été discutés et convenus lors de réunions entre leurs commandants militaires et les représentants des Emirats arabes unis en Libye », ajoutent-ils.
« Les paiements ont été fournis par les Emirats arabes unis et acheminés vers les mouvements par l’Armée nationale libyenne, qui a prélevé une part », selon les experts.
« En réaction aux allégations faisant état d’un éventuel soutien financier ou militaire accordé aux forces du Darfour (tant au Soudan qu’en Libye), les Emirats arabes unis ont évoqué la position modérée de leur pays et sa lutte contre l’extrémisme et les discours de haine », indique le rapport en évoquant une rencontre des experts avec les autorités émiraties datant de novembre 2021.
Le rapport affirme par ailleurs que le gouvernement soudanais a participé à des activités de la Commission militaire mixte dite « 5+5 » qui réunit des représentants de l’est et l’ouest de la Libye pour garantir le cessez-le-feu et le retrait des combattants et troupes étrangères de ce pays. Plusieurs « petits groupes (de mercenaires soudanais) opérant en Libye » ont « la volonté de s’engager dans des pourparlers de paix et de retourner au Soudan », précisent les experts qui recommandent à la communauté internationale de « fournir des fonds au Soudan et aux autres pays concernés » afin d' »éviter la déstabilisation de la région » du Darfour.
Le Darfour, vaste région de l’ouest du Soudan régulièrement secouée par des heurts liés entre autres à des disputes territoriales ou des difficultés d’accès à l’eau, a connu une longue guerre qui a fait depuis 2003 au moins 300.000 morts et 2,5 millions de déplacés selon l’ONU.