En marge du forum « Notre futur: dialogue Afrique-Europe » à Johannesburg en Afrique du sud, l’historien, politologue et enseignant universitaire camerounais Achille Mbembe, a annoncé le 6 octobre le lancement de la fondation de l’innovation pour la démocratie en Afrique.
son objectif; appuyer et accompagner les initiatives démocratiques portées par des acteurs de la société civile en Afrique.
« L’idée de créer cette fondation figurait en tête de liste des 13 recommandations que j’ai remise au président français Emanuel Macron en amont du sommet Afrique-France, qui s’est tenu en octobre 2021 à Montpellier. Au départ l’idée était de mettre en place un fond d’innovation pour la démocratie et qui s’est transformé en fondation. La réflexion qui nous a conduit à ce changement est qu’au fond nous avons besoin de nouveaux dispositifs. La fondation a vocation à être un nouvel outil pour innover sur le continent africain dans une démarche recherche-action et d’accompagner des initiatives portées par des acteurs de terrain » indique lors de ce lancement Achille Mbembe et Marie-Yemta Moussanang, franco-tchadienne productrice de podcasts Afrotopiques et enseignante à Science Po Paris.
« Il n ya pas d’autres voies hors du dialogue. Pour sortir d’une impasse il faut dialoguer. J’ai pris le risque de participer. Je souhaite que les africains soient courageux et discutent d’égal à égal » Achille Mbembe #DialoguesAfriqueEurope pic.twitter.com/297oAboGNT
— Annie Payep (@AnniePayep) October 6, 2022
En Marge de la journée de lancement de la fondation de l’innovation pour la démocratie en Afrique, une journée d’étude a été organisé avec les membres du comité de préfiguration de la fondation qui compte une douzaine de personnes et les partenaires et d’autres parties prenantes notamment des activistes et des acteurs de terrain.
« Cette fondation a été actée et les statuts ont été signés et le programme sera annoncé en mars 2023. La réflexion lors de la réunion d’aujourd’hui a porté notamment sur les modalités concrètes et la forme pratique que va avoir la fondation et la manière dont elle va fonctionner. Le projet de la fondation est en cours de définition. Les discussions et les débats autour de cette initiative sont animés, vifs et riches. C’est réellement une démarche collective parce que cette initiative se nourrit des idées et propositions des critiques, et aussi d’une grande proportion des acteurs africains investis dans le domaine de la démocratie » précisent Achille Mbembe et et Marie-Yemta Moussanang.
La fondation de l’innovation pour la démocratie en Afrique est hébergée au sein de l’université Witwatersrand de Johannesburg. La fondation sera complétée par trois campus en Afrique; le premier regroupera l’Afrique de l’ouest, le Sahel, le Sahara et la Méditerranée. Le deuxième sera situé dans le bassin du Congo et le troisième regroupera les pays de l’Afrique orientale. Le quatrième dans une ville en France pour la diaspora africaine.
« La fondation se définit comme un dispositif qui met la pensée critique au service de l’expérimentation. C’est une fondation panafricaine qui dépasse le découpage linguistique ou politique hérité de la colonisation. Le choix de l’implanter en Afrique du sud est que le pays dispose d’institutions puissantes capables de protéger la fondation et de garantir son indépendance » souligne Achille Mbempe.
Un nouvel outil pour repenser la relation Afrique-Europe
Selon Marie-Yemta Moussanang tous les outils pensés depuis 60 ans de coopération avec les pays de l’Europe ont été souvent abordé sous le prisme du développement économique. Le terme de démocratie, clairement affiché dans l’intitulé de la fondation, démontre la volonté de revenir à des réflexions critiques et de sortir de l’impasse de refaire les modèles appliqués auparavant et qui n’ont pas fonctionné, précise-t-elle.
Plus concrètement, la fondation de l’innovation pour la démocratie en Afrique procèdera tout d’abord à cartographier la somme des initiatives pour identifier les acteurs de la société civile au Cameroun, Gabon, Tchad et le Nigeria. Une fois identifiés, la fondation devra déterminer de quoi ces acteurs ont-ils besoin. Les conclusions de certaines recherches dans ce domaine indiquent, selon Achille Mbempe, qu’ils ont besoin d’appui à la formation, un besoin de recherche ouverte sur l’action et de soutien financier pour construire des institutions de la société civile.
Achille Mbempe estime que le continent africain est peuplé par des jeunes et au pouvoir « il y a des vieux hommes qui règnent sur des sociétés complètement neuves mais ou la majorité démographique a été transformé en minorité politique ».
« L’absence de renouvellement du personnel politique et l’importation d’idées qui ne donnent pas de résultats sur le terrain, fait, entre-autres, que des jeunes meurent en essayant de traverser la Méditerranée pour aller dans des endroits où personne ne les attend. Voilà la situation. Aujourd’hui on se demande qui va débloquer cette situation ? quelles forces sociales faut-il mobiliser pour remédier à la situation. Faut-il chercher des solutions dans notre propre histoire qui nous ont permis de nous lever et sur lesquelles nous pourront compter aujourd’hui ? Voila les enjeux la création collective d’outils et moyens et ressources pour accompagner les luttes démocratiques au niveau localée » conclut Achille Mbembe.