De nombreux crimes de guerre sont commis au Soudan dans le cadre du conflit qui oppose, depuis avril 2023, les forces armées soudanaises (FAS) aux Forces d’appui rapide (FAR), selon un rapport d’Amnesty International, publié jeudi 3 août.
Ce rapport, intitulé « La mort a frappé à notre porte », réunit des informations sur les atteintes massives aux droits humains commises contre la population civile pendant les attaques aveugles et aussi délibérées auxquelles se livrent les belligérants, selon l’ONG.
« Le rapport fait également état de façon détaillée des violences faites aux femmes et aux filles, d’attaques ciblées contre des biens de caractère civil tels que des hôpitaux et des églises, ainsi que d’un pillage systématique.Certaines des violations recensées – comme les attaques visant des civils et des infrastructures humanitaires, les viols et les autres violences sexuelles, et le pillage – constituent des crimes de guerre », est-il précisé.
Le rapport porte essentiellement sur des faits relevés à Khartoum et au Darfour occidental.
« Une horreur inimaginable »
« Partout au Soudan, les civils sont confrontés chaque jour à une horreur inimaginable dans le contexte de la lutte acharnée que se livrent les Forces d’appui rapide et les forces armées soudanaises pour le contrôle du territoire », a estimé Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.
Et d’ajouter :« Des gens sont tués chez eux ou alors qu’ils cherchent désespérément de la nourriture, de l’eau et des médicaments. Ils sont pris entre deux feux quand ils s’enfuient, et abattus délibérément lors d’attaques ciblées. Des dizaines de femmes et de filles n’ayant parfois pas plus de 12 ans ont été violées et soumises à d’autres formes de violence sexuelle par des belligérants des deux camps. Il n’y a pas d’endroit sûr ».
« La spirale de la violence dans la région du Darfour, où les FAR et les milices qui s’y sont alliées sèment la mort et la destruction, ravive le spectre de la tactique de la terre brûlée utilisée par le passé, avec parfois des acteurs identiques. Les FAR et les FAS, ainsi que les groupes armés qui leur sont affiliés, doivent cesser de cibler des civils et doivent garantir la sécurité de ceux qui partent pour échapper à la violence. Des mesures urgentes doivent en outre être prises pour garantir la justice et pour que les victimes obtiennent réparation », a ajouté la responsable d’Amnesty international.
Depuis le 15 avril 2023, les FAS, commandées par le président du Conseil souverain du Soudan, le général Abdel Fattah al Burhan, et les forces paramilitaires des FAR, dirigées par le général Mohamed Hamdan Dagalo, connu sous le nom de Hemedti, s’affrontent pour le contrôle du Soudan.
« Des crimes de guerre »
Selon l’ONG, les affrontements entre les deux parties sont régis par le droit international humanitaire, « qui vise à protéger les civils et les autres non-combattants lors de conflits armés, et par le droit international relatif aux droits humains, qui continue de s’appliquer ».
« Certaines graves violations de ces règles constituent des crimes de guerre, pour lesquels la responsabilité pénale individuelle de soldats et de commandants peut être engagée. Des hommes, des femmes et des enfants sont pris entre deux feux et les deux parties, qui utilisent souvent des armes explosives à large champ d’action, lancent souvent des attaques dans des secteurs densément peuplés par des civils », a-t-elle précisé.
Amnesty International dit avoir interrogé 181 personnes pour préparer ce rapport, essentiellement dans l’est du Tchad en juin 2023 et à distance en utilisant des moyens de communication sécurisés. « L’organisation a également examiné de nombreux documents audiovisuels montrant de possibles violations, ainsi que des images satellitaires pour corroborer d’autres faits », est-il indiqué.
Human Rights Watch (HRW), autre ONG de défense des droits humains, a, dans un rapport publié vendredi 4 août, appelé le Conseil de sécurité de l’ONU, pour qu’il prenne « des mesures urgentes » pour mettre fin « aux les atrocités en cours au Darfour » au Soudan. HRW accuse les Forces d’appui rapide et les milices arabes alliées de commettre des exactions dans sept villes et villages de cette région de l’Ouest du Soudan.