L’ancien Premier ministre français Dominique De Villepin a affirmé ce 20 mai qu’il est essentiel pour la France de demander pardon à l’Algérie pour les crimes perpétrés durant 132 ans de colonisation. Lors d’une conférence à la Faculté des sciences de l’information et de la communication, il a souligné que « ce n’est pas avec un petit chiffon qu’on efface un aussi lourd contentieux ».
De Villepin a rappelé que même un président de la République français n’a pas le pouvoir d’exprimer ces excuses seul : « C’est l’ensemble de notre histoire qu’on doit regarder. À mon sens, il faut en faire un passé commun et pas à pas, nous allons avancer, peuples et dirigeants ». Il a également mentionné les obstacles liés au travail de la Mémoire, mais a exprimé sa conviction que chaque étape permet de progresser.
Citant la reconnaissance par la France des crimes commis contre Maurice Audin et l’avocat Ali Boumendjel, De Villepin a affirmé que « les crimes coloniaux ne peuvent pas être effacés, mais nous avons tous le devoir de les reconnaître ».
Relations Franco-Algériennes et Vision Partagée?
Pour De Villepin, « l’Algérie et la France ont ce privilège d’avoir cette complémentarité dans leurs relations globales et historiques. Pour moi, c’est une relation d’État à État et de peuple à peuple ». Il a appelé à tempérer les excès, comme la haine, en transformant ces capacités en dialogue politique, soulignant que « l’Algérie et la France doivent faire émerger une vision partagée, basée notamment sur le multilatéralisme ». Selon lui, il est crucial d’accepter notre passé dans toute sa complexité et de renforcer notre capacité à construire un avenir meilleur ensemble.
Cette conférence a vu la participation de conseillers du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, du ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, des représentants du CREA, des ambassadeurs d’Algérie en France et de France en Algérie, ainsi que des représentants de l’APN, du Conseil de la Nation, de l’INESG, des chercheurs universitaires et des étudiants de plusieurs instituts d’Alger.
La chance d’avoir « l’Algérie au Conseil de sécurité »
Par ailleurs, Dominique De Villepin a estimé que « c’est une chance d’avoir l’Algérie comme membre non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU ». Il a abordé la multitude de conflits dans le monde, citant notamment le génocide perpétré par l’entité sioniste à Ghaza et à Rafah. Il a dénoncé la politique de « deux poids, deux mesures », affirmant qu’ »il y a une revendication légitime d’un peuple (palestinien-ndlr) qui a vu sa terre spoliée, où tout a été détruit. Pire encore, il y a eu des viols et des massacres d’enfants et de femmes. Toutes les conditions ont été réunies pour traîner ce peuple dans un engrenage meurtrier ».
De Villepin a salué la position franche et constante de l’Algérie au Conseil de sécurité de l’ONU. Il a exprimé son admiration pour le rôle de l’Algérie dans la promotion de la paix, notant que « le monde assiste impuissant à une logique de destruction et tous ces conflits sont, à mon sens, mémoriels ». Il a également souligné l’évolution des campus américains, qualifiés de « nouvelle donne », se réjouissant que « beaucoup de pays reconnaissent l’État palestinien. Les choses bougent et avancent, certes, mais je pense d’ores et déjà au jour d’après, c’est-à-dire après les armes, car il s’agira, là aussi, de savoir comment le territoire palestinien sera géré, sachant qu’Israël veut garder le contrôle ».
Connu pour son célèbre discours du 14 février 2003 à l’ONU, où il s’était opposé à l’intervention des États-Unis en Irak, De Villepin a également mis en évidence le rôle crucial que devra jouer l’Afrique pour faire face à la montée de nouveaux blocs dans le monde. Il a estimé que « les pays d’Afrique gagneront s’ils levaient les barrières, mutualisaient les infrastructures et élargissaient les bases des échanges et des modes de consommation ».