Le film jordanien « Inchallah un fils« , projeté en fin de soirée du 5 octobre dans la catégorie du long métrage au 12e Festival International d’Oran du film arabe frappe par sa maîtrise narrative et la profondeur de son intrigue, qui s’apparente à une descente aux enfers pour Nawal, magistralement interprétée par Mouna Hawa, une femme devenue veuve du jour au lendemain.
Alors qu’elle tente de naviguer dans une réalité devenue hostile après la mort de son mari, elle se rend vite compte que celui-ci n’a guère pris soin d’assurer sa sécurité matérielle, laissant derrière lui un vide béant. Ayant pourtant contribué à l’achat de leur appartement et leur pickup grâce à sa dot et ses salaires, Nawal voit toute sa vie menacée par l’absence d’un enfant masculin et l’absence d’un document légal attestant de son apport financier. Elle risque non seulement de perdre son logement, mais également la garde de sa fille, Noura, au profit de Khalaf, le frère du défunt, qui pourrait revendiquer sa garde en prouvant que Nawal n’a plus les moyens de l’élever.
L’intrigue s’articule alors autour d’une course contre la montre, où le fantastique s’invite sous forme de présages, intensifiant le suspense. Le réalisateur, à l’instar de certains films de l’iranien Asghar Farhadi, tisse un scénario où survie et tension se mêlent, mettant en lumière la dynamique complexe entre les personnages masculins, souvent présentés comme des vautours, des lâches ou des traîtres. Le film aborde des questions de morale et de réputation, créant ainsi un cadre propice à la réflexion sur la condition féminine dans une société patriarcale.
Mouna Hawa, dans le rôle principal de Nawal, est tout simplement fascinante. Elle incarne excellemment une femme qui fait face à une adversité quasi insurmontable, défiant les normes imposées par une législation et des mœurs qui la désavantagent. Son personnage dénonce l’hypocrisie d’hommes qui se servent de la religion à leur convenance, tandis qu’ils n’hésitent pas à recourir à la justice pour satisfaire leurs propres intérêts. Le film aborde également des thématiques sensibles, telles que l’avortement et le harcèlement de rue, offrant ainsi une vision sans concession des luttes des femmes dans un contexte où leurs droits sont souvent bafoués.
Par ailleurs, Inch’allah un fils soulève avec acuité le problème de l’héritage des femmes dans les sociétés arabo-musulmanes. La condition de Nawal met en lumière les inégalités structurelles qui persistent, exacerbées par un cadre légal qui favorise les hommes au détriment des femmes. La quête de Nawal pour sécuriser son avenir et celui de sa fille devient une métaphore puissante de la lutte pour l’égalité et la justice, et souligne l’urgence d’un changement sociétal.
Le film, sorti en 2023 et récompensé du Prix Fondation Gan à la diffusion lors de la Semaine de la critique, est une œuvre poignante qui mérite d’être vue et discutée. En exposant les injustices qui touchent les femmes, Inchallah un fils offre une critique acerbe de la société patriarcale, tout en rendant hommage à la force et à la résilience des femmes qui se battent pour leurs droits et leur dignité.