Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur français, en visite de travail en Algérie, depuis samedi 7 novembre 2020, n’a pas évoqué publiquement à Alger la demande relative au renvoi d’Algériens soupçonnés de radicalisme et en situation irrégulière en territoire français. Des personnes inscrites au FSPRT (Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste), considérées comme “potentiellement dangereuses” et dont le nombre reste indéfini.
« A la demande du président de la République, nous avons accéléré les retours des personnes (radicalisées) et nous avons choisi de donner une liste à chacun de ces pays pour qu’ils puissent reconnaître les citoyens qui dépendent de leur pays, avoir le retour de ces citoyens chez eux. Nous avons commencé avec nos amis marocains… nous comptons bien continuer effectivement avec la Tunisie et l’Algérie et demain avec la Russie », a précisé Gérald Darmanin dans une vidéo postée sur sa page Facebook lorsqu’il était à La Valette.
Selon les autorités françaises, 70 % des personnes « radicalisées » sont d’origine maghrébine ou russe. En tournée méditerranéenne depuis jeudi 5 novembre, le ministre français, qui a parlé de ses origines algériennes dans une interview au quotidien Le Parisien, a été reçu à l’aéroport Houari Boumediène par le secrétaire général du ministère de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire.
Habituellement, les ministres français arrivant en Algérie sont reçus par leurs homologues. Gérald Darmanin a eu des entretiens avec le Premier ministre Abdelaziz Djerad, le ministre des Affaires religieuses Youcef Belmehdi et le ministre de l’Intérieur Kamel Beldjoud.
« Ce qui compte, c’est d’avoir des informations »
Sur sa page Facebook, le ministre français a publié des photos accompagnées de commentaires. « Très heureux d’avoir pu rencontrer M.Youcef Belmehdi, ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, pour approfondir notre coopération et réaffirmer l’engagement de l’État français à garantir la liberté de culte », écrit-il.
« La France et l’Algérie sont liées par une relation d’amitié indéfectible », note-t-il après l’audience que lui a accordée le Premier ministre. Avec Kamel Beljoud, Gérald Darmanin dit avoir eu « un échange fructueux » pour « renforcer encore notre étroite coopération notamment sur le sujet migratoire et la lutte contre le terrorisme ».
« Ce qui compte, c’est d’avoir des informations après l’attentat ignoble de Nice, les services italiens et les services tunisiens nous ont beaucoup aidé à identifier la personne (l’auteur présumé de l’attentat est un jeune clandestin tunisien), à connaître ses habitudes, sa famille, ses réseaux pour pouvoir appréhender évidement le terrorisme islamiste qui frappe le territoire national et, finalement, tout le continent européen comme le montre encore l’attentat de Vienne », a souligné Gérald Darmanin dans la même vidéo.
Dans une brève déclaration à la presse, le ministre français de l’intérieur n’a pas précisé s’il eu une réponse à sa demande sur le renvoi de radicaux algériens mais a salué la coopération sécuritaire entre l’Algérie et la France dans la lutte contre le terrorisme. Une coopération qui continue, selon lui.
« Nous avons évoqué les grands sujets qui concernent la grande puissance algérienne ici en Méditerranée, notamment la question libyenne, la question de l’émigration clandestine que l’Algérie subit et à laquelle nous devons répondre, car nous avons des mouvements de population tout au long de cet espace que nous avons en partage », a-t-il dit.
« Bannissement de toutes formes de violence et d’extrémisme, quelle que soit leur origine »
Kamel Beldjoud n’a, de son côté, pas fourni beaucoup de détails sur la teneur de ce qui a été discuté avec son homologue français. «Nous avons évoqué les relations bilatérales distinguées et les voies et moyens de les améliorer. Nous avons abordé les questions de l’émigration clandestine, les relations entre les deux secteurs notamment la protection civile, la formation professionnelle et l’échange entre les différentes structures des deux départements ministériels », a-t-il précisé, cité par l’agence APS.
« Globalement, nos visions étaient convergentes sur tous les sujets que nous avions abordés », a-t-il ajouté. Des cadres des deux ministères de l’intérieur ont tenu durant la journée une séance de travail.
Youcef Belmehdi a, pour sa part, insisté sur « le bannissement de toutes formes de violence et d’extrémisme, quelle que soit leur origine ». « L’islam est une religion d’amour, de paix et de coexistence. Ce sont là, les recommandations que nous ne cessons pas de prodiguer aux imams détachés à la Grande Mosquée de Paris et auxquelles tous les imams détachés en France s’attachent à concrétiser », a ajouté Youcef Belmehdi, d’après un communiqué du ministère des Affaires religieuses.
Paris a décidé récemment de mettre fin à « l’islam consulaire ». Aussi, l’Algérie, le Maroc et la Turquie ne pourront-ils plus envoyer des imams en France pour assurer les prêches et les prières.