Sabri Boukadoum, ministre des Affaires étrangères, a ouvertement critiqué le fonctionnement actuel de la Ligue arabe cette semaine. Il a rappelé que l’Algérie exige depuis 2005 la réforme de la Ligue dont le siège est au Caire. « Est-il possible que la Ligue arabe cautionne le bombardement d’un pays arabe qui est membre de l’organisation? Est-il possible que la ligue arabe exclut un pays membre? Est-ce que la Ligue arabe rassemble les arabes ou les pays arabes? Non », a-t-il déclaré, samedi 11 juillet 2020, lors de son passage au Forum du journal Echaab, à Alger.
Pour Boukadoum, la réforme de la Ligue arabe exige une volonté politique commune de le faire. « Cette intention n’existe pas. Vous voyez la situation du monde arabe actuel. Les Occidentaux trouvent prétexte dans l’accord donné par la Ligue arabe pour le bombardement de la Libye (en 2011). Il faut noter que le Conseil de sécurité n’avait pas donné son ok pour bombarder la Libye », a-t-il ajouté.
En mars 2011, la Ligue arabe avait demandé la mise en place d’une zone d’exclusion aérienne en Libye en estimant que Mouamar El Kadhafi avait perdu sa légitimité « en raison des violations commises contre son peuple ». Alger et Damas s’étaient opposés à cette demande. Après l’adoption de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU sur « la zone d’exclusion aérienne », une offensive militaire est lancée par l’OTAN qui bombarde plusieurs cibles en Libye.
« Refonte totale »
L’Algérie a, selon Sabri Boukadoum, des idées sur la manière de réformer la Ligue arabe en tant que structures et principes. Des idées qui seront soumises lors du prochain sommet arabe prévu en Algérie. Ce sommet devait se tenir en mars 2020 mais a été reporté sine die en raison de l’urgence sanitaire liée à la Covid-19. C’est la première fois qu’un chef de diplomatie algérienne critique d’une manière aussi claire la Ligue arabe depuis Abdelaziz Belkhadem en 2005.
A l’époque, Abdelaziz Belkhadem, alors ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, avait déclaré que l’Algérie ne veut pas que la Ligue arabe devienne « une annexe du ministère égyptien des Affaires étrangères ». « Nous avons proposé un schéma de réformes qui ne concerne pas seulement l’organigramme et les institutions de la Ligue arabe. Nous avons proposé une refonte totale de la charte de la ligue», avait-il déclaré.
L’Algérie exige le retour de la Syrie à la Ligue arabe
Dans ce projet de refonte, l’Algérie voulait revoir la règle de l’unanimité au sein de la Ligue en proposant de maintenir le consensus uniquement pour les questions qui concernent les institutions. Dans le le plan algérien, les décisions au sein de la Ligue doivent être prises à la majorité qualifiée « pour éviter l’immobilisme » et « démocratiser » le fonctionnement de l’organisation.
Alger a reproché à la Ligue arabe d’avoir exclue la Syrie après le début de la guerre dans ce pays.Ahmed Abou El Gheit, le secrétaire général de la Ligue arabe, a abordé la question lors de sa visite à Alger en février 2020. D’après lui, il n’existe toujours pas de « consensus » au sein de la Ligue arabe pour un retour de la Syrie au sein de l’organisation. Certains pays s’y opposent encore comme l’Arabie Saoudite et le Émirats arabes unis.