Dans une lettre adressée au président Abdelmadjid Tebboune, publiée mercredi sur sa page Facebook, l’avocat Mostefa Bouchachi rejette dans la forme et dans le fond un projet de révision constitutionnelle qui institue un “pouvoir personnel” et fait du président un “empereur” s’immisçant tous les pouvoirs sans “être responsable ni politiquement, ni pénalement”.
Sur la forme, l’ancien président de la LADDH – qui répondait à une invitation du président à “enrichir” le projet – estime que cette proposition de révision ne déroge pas à la règle d’une quête de continuité du régime et que le procédé n’est pas démocratique. Or, ajoute-t-il, ”la fondation d’une Algérie démocratique exige que la Constitution soit le fait du peuple Algérien à travers une institution élue quelle que soit sa dénomination.”
Me Bouchachi relève par ailleurs que les gouvernements du monde entier orientent leurs moyens économiques et financiers dans la lutte contre la pandémie et reportent les questions non-urgentes. ”Votre idée de discuter et d’enrichir le projet est inappropriée compte tenu des circonstances de la crise sanitaire et du confinement”.
L’avocat estime que le chef de l’Etat aurait pu traduire son engagement électoral à réviser la Constitution en organisant une “conférence nationale avec la participation de toutes les sensibilités et l’ensemble du spectre politique et de la société civil” pour sortir avec un document consensuel.
Un “comité de rédaction des désirs du régime”
Au lieu de cela, ajoute l’avocat, ”vous avez mis en place un comité pour la rédaction des désirs et des orientations du régime pour donner le sentiment que c’est un comité d’expert qui a élaboré le projet”.
Sur le fond, Bouchachi s’est dit “surpris” d’un projet qui finalement consacre le “pouvoir personnel” et fait du président de la république un “empereur qui s’immisce dans le travail de l’ensemble des pouvoirs, y compris législatif et judiciaire” sans parler des organes de contrôle qui sont sous sa coupe par le biais des nominations. Le président est institué en quasi-empereur et il n’est “responsable ni au plan politique, ni au plan pénal” souligne-t-il.
Le projet, ajoute-t-il ne met en évidence aucun système politique spécifique, parlementaire, présidentiel ou semi-présidentiel. Il est même à l’opposé de « tous les principes contenus dans les constitutions qui établissent la démocratie ».
Il ne fait aucun doute, ajoute Me Mostefa Bouchachi que la “commission a traduit vos souhaits ou les souhaits du régime. Elle n’a pas écouté la classe politique et elle a ignoré la volonté de changement du peuple algérien et d’aller vers une véritable démocratie”. Je ne crois pas, ajoute Me Bouchachi, qu’avec un tel projet de constitution “vous allez pouvoir fonder une Algérie nouvelle, l’Algérie de la démocratie et des libertés pour laquelle les Algériens sont sortis le 22 février 2019”.
L’avocat aurait souhaité que le président “écoute la voix du peuple”, qu’il fasse preuve de “sagesse” en étant ouvert “aux aspirations des jeunes” et qu’il commence par “la rédaction d’une constitution consensuelle marquée par les “caractéristiques de la démocratie et de la liberté.” . Or, regrette-t-il, ce qui ressort du document est “une forte impression que le projet ne cherche qu’à créer les conditions de la continuité d’d’un système antidémocratique.”
En conclusion de la lettre, Me Bouchachi indique qu’il s’abstiendra de présenter des propositions en raison de la manière dont le projet a été rédigé aussi bien dans la forme que dans le contenu. Et en l’absence de toute garantie que d’éventuelles propositions seraient prises en compte.
[…] judiciaire, en plus des leviers de contrôle qu’il détient à travers les nominations », a estimé Me Mostefa Bouchachi. « Le projet ne fixe pas un régime clair, ni parlementaire, ni présidentiel, ni […]