Adopté dimanche 30 mai en conseil des ministres, un nouvel amendement a été apporté au Code pénal suscitant plusieurs interrogations et appréhensions sur ses futures mises en route.
L’ordonnance, selon son concepteur, vise à « renforcer le système juridique » de lutte contre le terrorisme, notamment à travers la « création d’une liste nationale des personnes et des entités terroristes », selon le communiqué du conseil des ministres.
Le texte publié au Journal officiel N°45, annonce une modification majeure à travers la définition de l’acte terroriste contenue dans l’article 87 bis.
Celle-ci élargit la définition de l’acte terroriste pour comprendre notamment « la volonté d’accéder au pouvoir ou de changer le système de gouvernance « par des moyens non constitutionnels » . « Est considéré comme acte terroriste ou sabotage, tout acte visant la sûreté de l’Etat, l’unité nationale et la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet », notamment d’ « œuvrer ou inciter, par quelque moyen que ce soit, à accéder au pouvoir ou à changer le système de gouvernance par des moyens non constitutionnels» ou «porter atteinte à l’intégrité du territoire national ou d’inciter à le faire, par quelque moyen que ce soit ».
Une liste de personnes et entités terroristes
L’autre amendement du Code pénal réside dans l’instauration d’une liste nationale de personnes et entités terroristes (art. 87 bis 13).
« Il est institué une liste nationale des personnes et entités terroristes qui commettent l’un des actes prévus à l’article 87 bis du présent code, qui sont classifiés « personne terroriste » ou « entité terroriste », par la commission de classification des personnes et entités terroristes, appelée ci-après la « commission ».
Le même article précise qu’ «aucune personne ou entité, n’est inscrite sur la liste mentionnée au présent article, que si elle fait l’objet d’enquête préliminaire, de poursuite pénale, ou dont la culpabilité est déclarée par un jugement ou un arrêt».
Le législateur définit l’entité comme « toute association, corps, groupe ou organisation, quelle que soit leur forme ou dénomination, dont le but ou les activités tombent sous le coup des dispositions de l’article 87 bis du présent code ».
L’amendement du code pénal controversé
Il indique que la « décision d’inscription sur la liste nationale est publiée au Journal officiel de la République algérienne, démocratique et populaire. Cette publication vaut notification des concernés, qui ont le droit de demander, leur radiation de la liste nationale, à la commission, trente (30) jours à partir de la date de publication de la décision d’inscription. »
«La commission nationale peut radier toute personne ou entité de la liste nationale, d’office ou à la demande de la personne ou de l’entité concernée, lorsque les motifs de son inscription ne sont plus justifiés».
L’article 87 bis 14 souligne que « sous réserve des droits des tiers de bonne foi, l’inscription sur la liste prévue à l’article 87 bis 13 du présent code, implique l’interdiction de l’activité de la personne ou de l’entité concernée et la saisie et/ou le gel de ses fonds et des fonds provenant de biens lui appartenant ou contrôlés, directement ou indirectement, par elle ou par des personnes agissant pour son compte ou sur ses instructions. »
L’inscription sur la liste, lit-on dans le texte, comprend également « l’interdiction de voyager pour les concernés, par décision judiciaire, sur demande de la commission ».
Pour cet article aussi, les « modalités d’application du présent article sont fixées par voie réglementaire ».
Ces nouvelles définitions suscitent les appréhensions et les interrogations des juristes et des observateurs de la scène politique tout autant que les avocats. L’amendement du code pénal replace l’indépendance de la justice au coeur de cette problématique.
« Les manifestants interpellés lors des manifestations du vendredi seront-ils jugés au regard de cet amendement? En quoi ont-ils enfreint la loi puisque le droit à la manifestation est consacré par le texte fondamental? », s’interroge-t-on encore.
Autant d’interrogations autour de cet amendement du code pénal qui ne trouvent pas de réponses au regard des dernières arrestations et condamnations en cascades des derniers vendredis.