Sabah Fakhri, l’un des plus célèbres chanteurs arabes de ce siècle, est décédé, ce mardi 2 novembre 2021, à l’âge de 88 ans.
Selon l’agence syrienne Sana, le chanteur est décédé à l’hôpital Ech-Chami à Damas après une longue maladie. Sana rappelle que Sabah Fakhri, Sabah Abu Qaws de son vrai nom , est né dans à Alep le 2 mai 1933.
Son père était un homme religieux soufi qui enseignait le Saint Coran et sa récitation. Sabah a maîtrisé la lecture du Coran à l’âge de six ans avant d’apprendre le chant religieux dans les cercles du dhikr.
À l’âge de dix ans, Sabah acquiert auprès des amis de son père, tels Omar al-Batsh, Mustafa al-Tarab, Subhi al-Harir et Bakri al-Kurdi, tout ce qui a trait aux mélodies et aux rythmes.
À l’âge de douze ans, Sabah chante son premier muwashshah, « Ya Hilal, il m’a manqué et s’est caché » (“يا هلالا غاب عني واحتجب”). Il contacte ensuite Ali al-Darwich et ses deux fils Ibrahim et Nadim, qui lui apprennent à jouer du oud et composent des chansons.
Grand interprète des muwashshah andalous
Puis, il accompagne le violoniste Sami al-Shawwa dans ses concerts à Alep et dans d’autres villes syriennes, et là il rencontre Fakhri al-Baroudi, dont il était fan, qui l’adopte sur le plan artistique et le fait intégrer à l’Oriental Music Institute.
À l’institut, il étudie auprès d’Omar al-Batsh, Aziz Ghannam et Majdi al-Aqili, apprend les rythmes, les muwashshah andalous, l’art de l’interprétation du qacid, les théories musicales et la récitation lyrique par solfège et maqamat.
Repéré par les compositeurs syrien, à sa sortie de l’Institut, ils lui proposent, au milieu des années 1950, des chansons qui lui permettent de rencontrer le grand public.
Fakhri al-Baroudi donne son nom au jeune Sabah qui devient Sabah Fakhri pour le nom de scène.
Après son retour à Alep, et un passage à l’Institut arabo-islamique, Sabah Fakhri pense à se retirer de la musique et à se consacrer au commerce, mais son attachement à l’art est plus fort. Il renoue avec la chanson.
Une voix forte et imposante
En 1961, son passage dans une émission musicale à la télévision syrienne animée par Jamil Wilayat, lance sa carrière. Il y chante « Assal al gharam nadhra » (L’origine de l’amour, un regard) de Mohammad Othman et « Qol lil malihati » « Dites à la belle », composés par lui-même.
A partir de cette date, Sabah Fakhri décide de rafraîchir et de moderniser certains chants alépins (القدود الحلبية) célèbres comme « Ya tira tiri ya hamama » et « Yamel Cham Ya Allah ya mali » d’Abou Khalil Al Qabani. Il reprend aussi les textes de Abderrahim Massloub, Sayed Darouich, Amin Al Joundi et Zakaria Ahmed.
Grâce à une voix forte et imposante et une parfaite maîtrise du chant, il devient célèbre avec d’autres titres du chant alépin, du Mouwachah, du moual et du tarab arabe comme « Qadouka el mayas », « Ibâthli gawab », « Foug al nakhl », « Lamni choubak », « Khamratou el hob », « Hayamatni », « Tal’aa min bit abouha », « We nabi yama », « Sayd al assari », « Ya chadi alhan », « Malek ya hilwa malek », « Ahwa al ghazal »…
Durant plus de 60 ans de carrière, Sabah Fakhri est monté sur les plus grandes scènes du monde de l’Australie à la Suède en passant par les Etats Unis, le Canada, l’Egypte, l’Irak et l’Allemagne. Les villes de Détroit et de Miami, aux Etats Unis, lui ont offert leurs clés pour l’honorer et reconnaître son apport valeureux à l’art musical arabe, partie importante de l’art universel.
Il chante pendant dix heures sans arrêt
A Londres, il anime plusieurs conférences sur les musiques orientales et les instruments utilisés et il est honoré par l’université de Californie aux Etats Unis.
A Caracas, au Venezuela, Sabah Fakhri bat un record mondial en 1968 : chanter sans interruption pendant dix heures sur scène.
Selon le chercheur tunisien Ilies Bouden, le répertoire de Sabah Fakhri compte 347 chansons dont 110 du patrimoine arabe ancien. Les compositeurs de ces 110 chansons ne sont pas connues. Sabah Fakhri a composé 66 chansons.
Un bref passage au cinéma
A la fin des années 1960, Sabah Fakhri interprète un rôle, son premier au cinéma, dans la comédie dramatique « Al Saalik » (les voyous) de Youssef Maalouf avec Douraid Al Laham, Nihad Al Qali’e et Meriem Fakhareddine.
Sabah Fakhri passe, au début des années 1980, au petit écran lors qu’il est sollicité par les producteurs libanais du feuilleton télévisée « Al Wadi Al kabir » (la grande vallée) pour jouer aux côtés de Warda El Djazairia et Hala Chawkat. Ce feuilleton musical a été réalisé par Eli Sâada.
Sabah Fakhri a obtenu plusieurs médailles de mérite en Tunisie, en Egypte, aux Emirats arabes unis et en Syrie, comme il a été à la tête des syndicats des artistes en Syrie.