En France, Dominique De Villepin, ancien premier ministre et ancien ministre des Affaires étrangères, est l’un rares hommes politiques à dénoncer publiquement l’indifférence de Paris et des Occidentaux à l’égard des crimes quotidiens commis par l’occupant israélien à Ghaza et en Cisjordanie contre les civils.
« Aujourd’hui, nous n’avons plus de voix sur la scène internationale », a-t-il déclaré à propos de la France, dans une interview accordée à la chaîne de radio publique France Inter, jeudi 12 septembre 2024.
« On a l’Ukraine où la situation se dégrade. On a Ghaza qui est, sans doute, le plus grand scandale historique depuis Jésus, je n’ose pas même trouver des références. Et donc, plus personne ne parle dans ce pays. C’est le silence, la chape de plomb. Les médias n’en parlent plus. Je suis obligé de googler pour trouver une brève qui me donne des nouvelles sur le nombre des morts à Ghaza. C’est un véritable scandale sur le plan de la démocratie. Et tout cela, au nom de quoi ? Au nom de la guerre. C’est la guerre, c’est comme ça ! Mais, ce n’est pas une guerre comme les autres à Ghaza puis que les populations civiles meurent « , a protesté Dominique De Villepin.
Et d’ajouter : « la France s’efface. C’est la France qui est en train de payer l’addition. Je ne peux pas l’accepter ».
Depuis le 7 octobre 2023, l’occupant israélien à provoqué la mort de plus de 41.000 civils dont des enfants et des femmes et 95 000 blessés à Ghaza et en Cisjordanie. Selon les experts, plus de 70.000 tonnes d’explosifs ont été lâchés sur les civils à Ghaza en onze mois, du jamais dans l’histoire !
« Une folie messianique »
L’ancien premier ministre français a critiqué le fait que les médias français ont tendance à se référer au ministère de la santé du Hamas pour annoncer le nombre des victimes à Ghaza. « Il y a plus de 40.000 morts. Ce n’est pas un chiffre tronqué. C’est malheureusement une réalité de tous les jours. A Ghaza, les corps, les cœurs, les âmes et les têtes sont en morceaux. Israël a créé les conditions d’une réoccupation de Ghaza. Israël a repris possession de Ghaza. Ghaza est complètement assiégée au moment où la Cisjordanie est en train de se décomposer. Nous sommes devant une véritable cocotte-minute », a-t-il dit.
Il a appelé à recourir à des leviers comme l’armement et l’économie pour imposer un cessez-le-feu à Ghaza. « Nous continuons à accepter de commercer avec un certain nombre de territoires où la colonisation israélienne est active. On avance des arguments inouïes sur le plan culturel et intellectuel. Certains disent qu’il faut laisser Israël mener sa guerre jusqu’au bout. Mais quel bout ? Israël n’a pas d’objectif politique. Et quand vous n’avez pas d’objectif politique, la seule chose que vous savez faire c’est la guerre. Il y a un objectif sécuritaire et identitaire. Il y a une folie messianique. Cela explique la catastrophe qu’il nous est donné de voir. Le monde regarde tout cela et en tire les conclusions. C’est pour cela que nous français, européens, occidentaux, sommes aujourd’hui pointés du doigt à cause d’un deux poids deux mesures qui ne peut être sauvé que par le droit international et un retour de la justice. Nous aurons à payer comptant, en termes d’efforts et de légitimité, notre droit à reparler et redonner des conseils en matière internationale. Il faudrait donner des preuves », a-t-il alerté.
Il qualifié les relations de la France avec l’Algérie d’exécrable, en raison de « l’initiative » de Macron de s’aligner sur les thèses marocaines sur le conflit du Sahara Occidental. Selon lui, la question migratoire peut être réglée par voie diplomatique en évoquant l’exemple italien. Rome a signé des accords avec les pays d’origine des migrants clandestins pour faciliter les réadmissions.
« Coup de force »
Dominique De Villepin a critiqué la nomination d’un Premier ministre « sans légitimité » en France et demandé des clarifications du président Emmanuel Macron. Michel Barnier a été nommé le 5 septembre 2024 après plus de cinquante jours des élections législatives, remportées par le Front Populaire (gauche). La France Insoumise de Jean Luc Mélenchon, d’autres partis de gauche et des organisations de jeunes ont dénoncé « le coup de force » d’Emmanuel Macron en organisant plus de 140 marches et rassemblements le samedi 7 septembre 2024 dans tout le pays.
Les manifestants ont appelé à la destitution d’Emmanuel Macron. « Il n’y a rien au-dessus du peuple souverain. Aucun monarque, aucune loi autre que celle qui vient du peuple (…)La démocratie, ce n’est pas seulement l’art d’accepter d’avoir gagné, c’est aussi l’art et l’humilité d’accepter de perdre. Et vous avez perdu, non pas une fois, mais trois fois », a déclaré Jean Luc-Mélenchon en s’adressant à Emmanuel Macron.
Il a rappelé la perte du parti du président en exercice lors des élections européennes et aux élections législatives anticipées en 2024. « Vous n’avez pas à décider ce que c’est une solution stable en démocratie. C’est l’Assemblée nationale qui le décide. Il n’y aura pas de trêve. Je vous appelle à une bataille de longue durée. Le déni de démocratie ne pourra pas être effacé », a ajouté le leader de la France Insoumise dans un rassemblement.
Il a promis de censurer le prochain gouvernement que Michel Barnier peine à nommer et appelé au départ d’Emmanuel Macron, « et personne d’autre ». En France, le Premier ministre doit être l’émanation des résultats des élections législatives pour appliquer le programme du parti qui gagne le scrutin. « Les français ne comprennent rien à ce qui se passe, on ne leur explique rien. Ils sont tenus à l’écart. La démocratie doit se faire in-vivo, pas in-vitro », a regretté Dominique De Villepin.