12e Fiofa: “Terre de vengeance”, une histoire ennuyeuse sur une revanche incertaine

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12e Fiofa: "Terre de vengeance", une histoire ennuyeuse sur une revanche incertaine
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“Terre de vengeance” le nouveau long métrage d’Anis Djaad a été projeté, dimanche 6 octobre, en avant première mondiale au 12e Festival international d’Oran du film arabe qui se poursuit jusqu’au 10 octobre.


Après un court métrage inconsistant et décousu, “La nuit de Abed”, Anis Djaad tente péniblement l’expérience du “cinéma contemplatif” avec “Terre de vengeance”, un revenge movie sans éclat. L’histoire n’est pas une originalité, l’homme qui sort d’une privation de liberté pour se venger relève du déjà vu et déjà lu dans les séries, le cinéma et la littérature.


Djamel (Samir El Hakim) quitte la prison après avoir purgé une peine de trois ans pour “corruption”. Il trouve de la difficulté à retrouver ses repères malgré une période de détention relativement courte. Son épouse est partie avec son fils Adel en prenant l’argent et le chef (Chawki Amari) pour qu’il offrait ses services refuse de le payer. Aidé par sa sœur, Djamel, un homme solitaire et mélancolique, part au village où il décide de se reconvertir en agriculteur. Une manière de reconstituer sa vie en cultivant la terre.


“La reconstruction” de la vie

Il s’associe à son cousin et ami Mohamed (Mohamed Mouffok). Au niveau de l’administration, Kader (Mohamed Takiret) exige un pot de vin pour accélérer la procédure d’obtention d’un crédit. Son supérieur (Hamid Krim) a d’autres calculs. Djamel et son associé découvrent qu’il n’y a pas d’eau dans l’exploitation agricole. Djamel est alors face à un dilemme, poursuivre “la reconstruction” de la vie ou se venger peut être de la famille Boudjellal, celle du patron de l’agence agricole, qui a un vieux compte à régler avec lui.


Le retour de l’oncle (Rachid Benallal), apparu comme important dans la narration, n’a finalement rien apporté au récit. Il est pourtant  filmé comme “un sauveur” marchant seul sur un chemin, un chapeau sur la tête. Djamel, qui curieusement ne semble pas pressé de retrouver son fils ni son (ex) épouse, est pris par un sentiment de revanche. Mais contre qui ? Sa famille ? Son épouse ? Lui- même ? La société ? Au spectateur de combler les cases vides…


Un spectateur qui se perd à essayer de comprendre une histoire mal racontée dès le départ. Anis Djaad évoque “un fil conducteur” dans le récit. Un fil invisible à l’écran.  A part fumer et regarder par la fenêtre, Djamel est un personnage qui est resté le même de la première à la dernière séquence comme si le réalisateur voulait le “figer” dans son rôle. Il n’y a aucune évolution pouvant donner de l’épaisseur à l’histoire. Il en est de même pour Mohamed qui adopte la mélancolie de Djamel et donne l’impression de sombrer dans l’abîme. L’échec du projet agricole peut-il justifier cette chute ? Le chômage?  


De la platitude à tous les étages

Les dialogues, faibles, sont à peine compréhensibles comme si les personnages parlaient juste entre eux. Aucune phrase lumineuse, juste de la platitude à tous les étages. Les plans du film sont souvent fixes jusqu’à l’exagération. Certaines images sont prises à partir de cadres et de fenêtres laissant passer une lumière naturelle. Les séquences sont parfois répétitives. S’il y a une esthétique de la lenteur dans les images du film, l’ennui qui s’en dégage peut être imprévisible, le risque de décrochage du spectateur est bien réel. Le résultat était sans appel : la moitié de la salle Maghreb s’est vidée lors de la projection.


Anis Djaad semble vaguement s’inspirer du style cinématographique du sud coréen Hong Sang-soo connu par les longs plans fixes dans ses films. Un style présent également dans le cinéma japonais, turc et iranien.  Le réalisateur, qui veut que son histoire soit “réaliste”, ne s’intéresse pas trop au mouvement oubliant, peut-être, que le cinéma, c’est aussi un rtyhme. Et, un rythme non maîtrisé peut désarticuler tout le récit, voire le détruire. Les silences lourds n’ont aucunement servi le récit, ils ont juste ajouté deux ou trois couches à l’ennui de voir une histoire tourner en rond.


Un homme blessé


Samir El Hakim a curieusement invité les spectateurs à ne pas chercher “une logique” dans le film soulignant que son personnage était “un homme blessé avec un comportement illogique”. “On ne peut pas comprendre ce qui se passe dans sa tête”, a-t-il dit pour justifier l’incompréhension suscitée par le film. Si le personnage principal du film n’a pas “compris”, comment le public peut-il alors avoir accès à l’histoire ?


Comment comprendre qu’un père, qui sort d’une détention, ne court pas chercher son fils et faire son possible pour le retrouver ? “On a raconté l’avant-recherche du fils. Le personnage doit d’abord reconstruire sa vie et espérer retrouver son fils.  On ne pouvait  pas dissocier l’histoire de l’argent de celle de l’enfant. Et si on veut rechercher le fils, on a toujours besoin d’argent” a souligné Anis Djaad, lors du débat qui a suivi la projection du film à la salle Maghreb.

Le cinéaste ne semble trop “aimer” le personnage de Djamel. “Mon souhait est que tous les corrompus finissent de cette manière. C’est une position qui n’est pas cinématographique. Djamel a tenté une reconstruction qui n’a pas marché finalement”, a-t-il confié. Face à des critiques du public, Anis Djaad a invité les spectateurs à “mieux connaître” le cinéma !  On attendra peut être le prochain film de ce réalisateur très sûr de lui pour comprendre ce qu’il veut raconter au grand écran. Ou peut-être essayer de comprendre. 

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