Dissolution du CCIF: la France « sur la voie du délit d’opinion » (ONG)

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Manifestation contre l'Islamophobie à Paris, le 10 novembre 2019 - DR
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La décision de dissolution du collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) prise par le Conseil des ministres français le 2 décembre 2020 est dénoncée par la Ligue française des droits de l’homme (LDH) qui y voit une décision « politique » où le gouvernement s’engage dans la « voie du délit d’opinion ». La mesure, survenant dans un contexte où les musulmans de France sont fortement mis à l’index, rendu implicitement responsables d’actes terroristes dont celui de l’assassinat de l’enseignant Manuel Paty, a été justifiée par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, par le fait que le « CCIF conduit avec constance une action de propagande islamiste ».

Dans un contexte où la bataille pour la présidentielle est déjà engagée, le ministre de l’intérieur, développe un discours musclé pour aller dans le sens d’une droite extrême qui fait des musulmans les responsables de tous les maux de France.

La lecture du décret – très long – de dissolution laisse en effet très dubitatif, le Comité contre l’Islamophobie n’étant accusé d’aucun fait délictueux précis, par contre son combat contre l’Islamophobie est accusée de faire le jeu du « terrorisme » et de « délégitimer » l’action du gouvernement.  

La Ligue française des droits de l’homme qui n’est pas surprise par la décision, souligne que la longueur du décret de dissolution ne doit pas faire illusion car sa « lecture atteste que les griefs des pouvoirs publics sont avant tout d’ordre politique quand ils ne se bornent pas à faire état de déclarations de tiers. »

La LDH, qui se fait d’ailleurs violemment attaquer sur les réseaux sociaux par sa prise de position, souligne qu’en décidant de dissoudre une association parce qu’elle a qualifié d’islamophobes « des mesures prises dans le but de prévenir des actions terroristes et de prévenir ou de combattre des actes punis par la loi », le gouvernement s’engage sur la voie du délit d’opinion. »

« En y ajoutant que les opinions du CCIF constituent des « agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme » et « qu’il défend et promeut une notion d’islamophobie particulièrement large », le gouvernement nous montre que plus personne n’est à l’abri de telles ou telles poursuites » indique l’ONG française. La Ligue des droits de l’Homme (LDH) se dit «profondément inquiète de cette atteinte à l’Etat de droit. Elle ne peut conduire qu’à accroître les tensions et à conforter l’idée que ce sont bien toutes les personnes musulmanes qui sont ici mises en cause. ».

Le CCIF, après la publication des justifications du gouvernement français, a décider de contester devant le Conseil d’État sa dissolution après la mort de Samuel Paty. Il dénonce une mesure «politique» décrétée alors qu’il n’avait «pas le moindre rapport avec cette affaire», a annoncé vendredi 4 décembre son avocat. «Le CCIF ira au Conseil d’État pour montrer que cette dissolution est un abus de pouvoir de M. Darmanin, instrumentalisé à des fins politiques car le CCIF a comme d’autres organisations critiqué la politique du gouvernement et sa tendance à restreindre les libertés», a déclaré Me Sefen Guez Guez.

Mélenchon « hypocrites de la laïcité : vous visez l’Islam ! »

A noter également que le chef de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a dénoncé vigoureusement les « hypocrites de la laïcité ». « Vous visez l’Islam » a-t-il déclaré le 3 décembre 2020 à l’assemblée nationale française. « S’il y avait le moindre doute sur ce qui est visé par ce texte qui en reste à quelques généralités redondantes et inutiles, les interventions que nous avons entendues nous auront suffisamment éclairées. Vous visez l’Islam et vous le faites sans discernement en ne tenant pas compte de ce qu’est l’Histoire profonde de la France, à qui les guerres de religion n’ont jamais rien valu de bon. » a souligné Mélenchon.

« Votre texte est d’une hypocrisie absolue. Avez-vous l’intention de dissoudre les partis identitaire et suprématiste blanc qui existent en France : non. Avez-vous l’intention de dissoudre la ligue de défense juive, qui a grossièrement insulté les parlementaires de la France insoumise et les a obligés à quitter, sous la protection de la police, une manifestation. Une organisation qui est déclarée terroriste en Israël et aux États-Unis d’Amérique, non plus. Avez-vous l’intention de cesser les relations avec les régimes islamiques qui chaque année condamne des dizaines de personnes à la peine de mort ou à la lapidation : non plus. ». Pour Mélenchon, le gouvernement est entrain « de donner à la France une image lamentable ».

En réaction à cette dissolution, le Conseil des relations américano-islamiques (CAIR) a indiqué avoir mis disposition du CCIF des bureaux et des ressources logistiques dans son siège social à Washington. Le CAIR a qualifié la dissolution du CCFI de « répression visant la communauté musulmane et ses droits juridiques

 « En moins de trois mois, le gouvernement français a promulgué une série de mesures anti-musulmanes violant les droits à la liberté religieuse des Français musulmans », estime l’organisation américaine, qui dénonce notamment l’action récente du ministère de l’Intérieur contre 76 mosquées. « Le gouvernement de Macron, qui prétend valoriser la liberté d’expression, a créé un deux poids, deux mesures en distinguant les Français musulmans et en remettant en question leur légitimité en tant que citoyens français » souligne le CAIR.

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