L’histoire de l’un des quartiers emblématiques d’Alger, Bab El Oued, sa création, le mode de vie qui y régnait de la période coloniale aux années 1980, ses stades, plages et salles de cinéma constituent le dernier récit de Mahdi Boukhalfa publié récemment sous le titre « La Cantera, il était une fois Bab El Oued« .
Publié aux éditions « Dar El Qobia », ce récit de 231 page relate la vie dans ce quartier et son histoire, tel que perçues par ses habitants et tente d’expliquer aux plus jeunes la valeur et l’amour portés à Bab El Oued même après avoir perdu son lustre.
L’auteur revient sur la création de ce quartier, au premières années de la colonisation française, par des espagnols, des maltais, ou encore des italiens qui s’étaient installés dans des baraquements au pied d’une carrière, qui deviendra vers 1900 la « carrière Jaubert », et qui ont fondé la Cantera, carrière en espagnol.
Il revient sur sa jeunesse dans le quartier et sa scolarisation au lycée de l’Emir Abdelkader qui a vu passer sur ses bancs d’illustres personnalités de divers horizons à l’image de l’écrivain et anthropologue Mouloud Mammeri, l’écrivain Albert Camus, Dalil Boubakeur le recteur de la mosquée de Paris, ou encore le comédien Roger Hanin.
Le Bab El Oued des années 1970 occupe une place importante dans cet ouvrage qui raconte les files d’attente interminables devant les nombreuses salles de cinéma du quartier comme le Lynx, le Plaza ou le Marignan, les innombrables cafés-bar et les vitrines des nombreux libraires et disquaires.
Bab El Oued, plus qu’un quartier, une histoire
L’auteur raconte également un quartier populaire où les places publiques sont très prisées, et jouent un rôle important dans ce microcosme de la société où la passion pour le football et les grands clubs algérois côtoient l’amour de la mer et de la pêche.
La vie à Bab El Oued est également rythmée par les rencontres de football entre les deux grands clubs de la capitale, MCA et USMA, des derbys que l’auteur restitue dans le moindre détail depuis l’ambiance festive d’avant match jusque dans les tribunes à Bologhine et plus tard au stade du 5 Juillet.
L’auteur témoigne également des événements du 5 octobre 1988 dans ce quartier et la « fusillade du 10 octobre de la même année qui a fait des dizaines de morts et de blessés (…), une date restée comme un trou béant dans la mémoire du quartier ».
Autre épisode dramatique de l’histoire de ce quartier, les inondations de novembre 2001 qui ont fait des centaines de morts et de disparus et qui ont définitivement changé l’aspect du quartier et fragilisé de nombreuses bâtisses, est également relaté par l’auteur.
Mahdi Boukhalfa évoque par ailleurs un « univers urbain particulier » qui a subi de nombreux changements, souvent brusques, comme l’aménagement de la plage Rmila, l’abandon des salles de cinéma, ou encore récemment « la destruction et la disparition sans gloire du marché des Trois Horloges ».
Né à Alger en 1955, Mahdi Boukhalfa est sociologue de formation et journaliste de profession qui a entamé sa carrière en 1983 à l’agence de presse Algérie presse service.
Il signe en 2019 son premier ouvrage « Mama Binette, naufragée en Barbarie » qui sera suivi de « La révolution du 22 février » et « La marche d’un peuple, les raisons de la colère » sorti fin 2020 et de « Pavillon Covid-19, sept jours en enfer » un récit publié en début d’année.