TikTok est toujours accessible aux Etats-Unis, deux jours après l’interdiction annoncée par Donald Trump, mais plusieurs membres du gouvernement ont évoqué des mesures imminentes contre le très populaire réseau social.
Le président « va passer à l’action dans les jours qui viennent en réponse aux divers risques pour la sécurité nationale que posent les logiciels liés au Parti communiste chinois », a déclaré dimanche le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo sur la chaîne Fox News.
TikTok doit être vendue ou bloquée aux Etats-Unis, a aussi averti dimanche le secrétaire au Trésor américain Steven Mnuchin, sur la chaîne ABC.
Le réseau social international appartient au groupe chinois ByteDance, qui, en Chine, opère une appli sur le même principe mais séparée, avec un nom différent.
Dans un contexte de tensions politiques et commerciales avec la Chine, Washington accuse depuis des mois l’interface d’être utilisée par le renseignement chinois à des fins de surveillance. TikTok a toujours fermement nié tout partage de données avec Pékin.
Le ton est monté depuis que, vendredi, le locataire de la Maison Blanche a annoncé qu’il « bannissait » la très populaire application de partage de vidéos légères.
« Nous n’allons nulle part », a réagi Vanessa Pappas, responsable de la branche Etats-Unis de TikTok, dans une vidéo publiée sur le réseau samedi, assurant aux utilisateurs que l’appli était là pour « rester ».
« Les grands perdants »
« Les Etats-Unis seraient les grands perdants si TikTok était bannie », a déclaré samedi Daniel Castro, vice-président de la Information Technology and Innovation Foundation, un think tank proche des géants de la tech.
« Des millions d’Américains, y compris de nombreux supporters de Trump, l’utilisent pour créer et partager des contenus. (…) Tous ses serveurs sont situés hors de Chine, et il n’y a aucune preuve qu’elle constitue une menace pour la sécurité nationale ».
Vendredi soir, le président était catégorique: « J’ai le pouvoir » de bannir l’appli, a-t-il assuré à des reporters.
Il a menacé d’utiliser un décret ou la loi IEEPA (International Economic Emergency Power Act), qui donne au chef de l’Etat certains pouvoirs pour réguler le commerce international en cas de « menace (étrangère) inhabituelle et extraordinaire » contre la diplomatie américaine, la sécurité ou l’économie.
Donald Trump peut prendre des mesures qui restreindraient l’accès de TikTok au marché américain ou obligeraient Apple et Google à retirer le réseau de leurs magasins d’applis.
De quoi inquiéter les utilisateurs de la plateforme de partage de vidéos légères, surtout les créateurs de contenus qui y gagnent de l’argent.
Plusieurs d’entre eux ont posté des liens vers leurs profils Instagram ou YouTube pour ne pas perdre leurs abonnés en cas de fermeture. D’autres font de l’humour ou tentent de prouver qu’il est impossible de bloquer un réseau aussi populaire.
Certains assurent que Donald Trump cherche à se venger des rangées de sièges vides lors de son meeting de campagne à Tulsa (Oklahoma) fin juin, quand des adolescents avaient proclamé sur TikTok qu’ils avaient commandé de nombreux billets d’entrée avec la ferme intention de ne pas y aller.
Rêve américain
Le 1er juin, Kevin Mayer, l’ancien responsable des plateformes de streaming de Disney (Disney+, Hulu et ESPN+), a pris la tête de la plateforme. Samedi, Vanessa Pappas a promis 10.000 créations d’emplois aux Etats-Unis sur trois ans, en plus des 1500 employés existants.
« Ne vous laissez pas avoir », s’est enflammé Peter Navarro, un proche conseiller du président, adversaire farouche de la Chine et artisan de la guerre commerciale déclenchée contre Pékin.
« La Chine a engagé tout plein de lobbyistes américains. Ils ont mis une marionnette comme patron de cette entreprise », a-t-il lancé sur Fox News samedi.
Vendredi soir, Donald Trump a aussi fait savoir qu’il était opposé à un rachat par un groupe américain, une solution qui mettait pourtant d’accord la plupart des acteurs en présence, y compris ByteDance, selon le New York Times.
Des négociations pour l’acquisition des activités américaines de TikTok par Microsoft étaient à l’arrêt samedi à cause des commentaires du président, d’après le Wall Street Journal.
« Ça devient bizarre. Une vente à 100% à une entreprise américaine, qui aurait été considérée comme une solution radicale il y a deux semaines, permet de pallier les inquiétudes raisonnables sur la protection des données », a tweeté samedi Alex Stamos, ancien responsable de la sécurité chez Facebook et chercheur à l’université de Stanford. « Si la Maison Blanche tue (ce rachat), on saura qu’il ne s’agissait pas de sécurité nationale ».