Engagé dans la course pour la présidentielle, le président français Emmanuel Macron entend gérer « le dossier de la mémoire », selon son propre agenda.
Le président Emmanuel Macron a confirmé ce mardi 5 octobre ses propos rapportés par le journal français le Monde sur l’Algérie, l’Histoire et l’existence de la nation algérienne.
A la question de savoir s’il maintenait ses propos sur l’Algérie, Emmanuel Macron botte en touche : « ce qui se passe aujourd’hui est une crispation ». Manière d’essayer d’atténuer de l’ampleur de la crise diplomatique qu’il a provoquée avec l’Algérie.
Alger, qui a accusé Macron d’insulter les Martyrs de la guerre de libération nationale, a rappelé son ambassadeur à Alger, convoqué l’ambassadeur de France au ministère des Affaires étrangères et fermé l’espace aérien aux avions militaires français participant à l’opération Barkhane au Mali.
« J’entretiens des relations cordiales avec le président Tebboune »
« Ce qui se passe aujourd’hui est la réplique de ce que nous avons connu au printemps 2020. Je rappelle que l’Algérie avait déjà rappelé son ambassadeur à Paris suite à un reportage d’ailleurs réalisé par le même journaliste qui avait décrit ce qui se passait en Algérie », a déclaré Macron.
Le journaliste français d’origine algérienne Mustapha Kessous, qui a rapporté les déclarations de Macron dans le quotidien Le Monde du 30 septembre 2021, avait réalisé le reportage « Algérie, mon amour » sur le Hirak. Un reportage critiqué autant par les autorités que par les militants du Hirak et de l’opposition compte tenu de son caractère tendancieux et réducteur.
Après la diffusion par France 5 « d’Algérie, mon amour », Alger a rappelé son ambassadeur à Paris le 27 mai 2020.
« J’ai le plus grand respect pour le peuple algérien et j’entretiens des relations cordiales avec le président Tebboune. Après, nous, nous avons enclenché un travail avec le rapport demandé à Benjamin Stora, la commission que nous allons lancer sur la base de ce travail, travail en profondeur avec la jeunesse française et franco-algérienne », a soutenu Macron en essayant de minimiser la réaction des autorités algériennes.
« L’écriture commune de l’Histoire » est-elle possible ?
Dans son rapport remis en janvier 2020, l’historien Benjamin Stora recommandait la création d’une commission « mémoire et vérité » composée de «personnalités engagées dans le dialogue franco-algérien», à l’image de Karim Amellal, ambassadeur, délégué interministériel à la Méditerranée.
Le rêve de Stora est « une écriture commune de l’Histoire ». Des intellectuels et des historiens ont pourtant clairement répondu à cette proposition : « une puissance coloniale, responsable de massacres, de pillages, d’exactions massives, ne peut pas écrire l’histoire avec un pays colonisé, ayant subi une domination violente ».
Les Algériens évoquent les crimes coloniaux, les enfumades, les terres et forêts brûlés au napalm, les massacres de 1945, les explosions nucléaires dans le sud dans les années 1960, les disparitions des années 1950, les tortures…
Avant Macron, Nicolas Sarkozy, ancien président, et Bernard Kouchner, ancien ministre des Affaires étrangères, avaient tenté de vendre l’idée d’éloigner la jeunesse algérienne de son histoire, sous prétexte de « regarder vers l’avenir », de « tourner la page ». En Europe, les crimes du nazisme sont enseignés dans les écoles parce qu’ils font partie de l’histoire du vieux continent. Pourquoi alors, la jeunesse algérienne devrait-elle se détourner de l’Histoire de son pays ?
Logique électoraliste
Dans son interview à France Inter, Macron évoque « les désaccords » qui peuvent exister dans la vie alors qu’il s’agit de faits historiques, établis et documentés, qu’il faut reconnaître. Macron a demandé pardon aux Harkis, supplétifs algériens de l’armée coloniale française, mais n’a pas répondu aux demandes sur la reconnaissance des crimes coloniaux, pourtant formulées depuis des années. Aucun mot d’excuse.
Macron, candidat non encore déclaré à l’élection présidentielle de 2022, entend clairement gérer le dossier de la mémoire selon une logique électoraliste. Il a parlé de Français « enfants, petits-enfants de Harkis, de pieds-noirs, d’appelés et de militaires » ayant un lien avec l’Algérie. Qu’en est-il des victimes algériennes de l’occupation française de l’Algérie ? De la réparation pour les personnes exposées aux radiations nucléaires après les explosions du Sahara ? Des proches des disparus de la guerre de libération nationale ?
Macron veut reconnaître « toutes les mémoires et leur permettre de cohabiter », mais celles liées à l’Histoire de France. « Il y aura immanquablement d’autres tensions », a-t-il dit par rapport à l’Algérie, au Continent africain.
Il n’y a donc aucune reculade par rapport à ses déclarations publiées par le Monde. Le travail sur la mémoire est, selon lui, un problème franco-français. « Il ne s’agit pas d’un problème diplomatique », a-t-il noté.
Des annonces pour le 17 octobre ?
L’entourage du président français, en fin de mandat, fait circuler l’information sur des annonces qualifiées d’importantes que fera Macron le 17 octobre prochain, à l’occasion du 60ème anniversaire de la répression sanglante de la manifestation d’Algériens à Paris organisée par la fédération de France du FLN pour réclamer l’indépendance de l’Algérie. Plus de 200 personnes ont trouvé la mort, certains jetés dans la Seine par les policiers menés par le préfet Maurice Papon.
Maurice Papon n’a jamais été jugé pour ses faits criminels à l’égard des Algériens. Il est resté tranquillement à son poste jusqu’à 1967. A Maurice Grimaud, qui le remplaçait à la préfecture de police de Paris, général de Gaulle avait dit : « Vous avez là un poste très important et exposé. Vous succédez à un homme qui l’a occupé de façon considérable ».
Pourquoi avoir laisser traîner depuis 1962 cette histoire du jour de l’indépendance algérienne. ? Les registres de l’histoire sont pourtant , clairs : c’est bien le 3 juillet 1962 que l’Algérie accédait officiellement à l’indépendance, dans la foulée de la proclamation des résultats du référendum d’autodétermination organisé le 1er Juillet 1962. Le choix du 5 juillet pour fêter la libération est dicté uniquement par le désir d’effacer symboliquement la date de la chute d’Alger, un triste 5 juillet 1830.
Ce référendum portait sur : : «Voulez-vous que l’Algérie devienne un Etat indépendant coopérant avec la France dans les conditions définies par les déclarations du 19 mars 1962 ?»
le «oui» l’avait emporté avec 99,72%. Et le 3 juillet, le général de Gaulle signait une déclaration solennelle sous le titre «Déclaration du 3 juillet 1962 portant reconnaissance de l’indépendance de l’Algérie».
Pres de Cinquante ans sont passés , le lourd fardeau de la repentance est toujours là : » Notre peuple exige toujours une reconnaissance de ses souffrances de la part du colonisateur d’hier, la France. Le partenariat d’exception gagnera en sérénité et en élan dans une reconnaissance des vérités de l’histoire.» Après ces propos du président Abdelaziz Bouteflika pour la Fête nationale du 5 Juillet, estimant que la France doit faire un pas vers la reconnaissance de ce qu’elle a commis durant la colonisation, des commentaires ici et là annoncent attendre une réponse du président Emmanuel Macron face à cette demande de la plus haute autorité algérienne.
C’était en en 2017 et rien n’est visible à l’horizon sur un sujet qui est primordial. Un sujet qui doit ouvrir de nouveaux horizons entre les deux pays , mais ….