Makri cherche à fédérer les “néo-conservateurs” Algériens: un pari risqué

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Makri chez les oulémas - Photo Facebook Makri
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Pour Abderrezak Makri, président du MSP, l’esprit de Mazafran est révolu, le temps est à nouveau à la « guerre » contre les « laïcs », la « 5ème colonne » des colonialistes et à la tentative de fédérer les néo-conservateurs à l’algérienne, ces fameux «sektembari » porteurs d’un discours violents et haineux sur les «zouafa » et les « agents de kharanssa», des partisans de Gaïd Salah, qui mènent désormais campagne sur les réseaux sociaux pour le «non » à la révision de la Constitution.

Lundi, Abderrezak Makri, était chez l’association des Oulémas, dans le “cadre des relations et des visites du mouvement avec les acteurs politiques et civils” laquelle, sans appeler expressément à voter “non” a exprimé de “vives réserves et inquiétudes” à l’égard du projet de constitution.  L’association a pointé des articles qui “minent” l’identité nationale, la position de l’Islam ainsi que les ambiguités sur la question de la liberté du culte, la langue… 

Pour l’association, la question de la “neutralité idéologique de l’école” est un signe que l’on œuvre à l’éloigner de son  “identité” et de “son nationalisme” qui sont les deux piliers pour faire un “bon citoyen” et protéger la famille de tous les maux”. Un terrain idéologique dans lequel le MSP est sur la même longueur d’ondes avec les vieux oulémas mais également avec les “badissi-novembari plus récents. 

Le MSP a boycotté la séance de l’adoption de la révision au parlement, mais il a, comme la nébuleuse de l’extrême-droite algérienne des Khettal and co, appelé à voter « non » au référendum. Cette nébuleuse s’estime “trahie” par les concessions qui auraient été faites aux laïcs et au détriment des “constantes”. 

L’attitude du MSP assez paradoxale: ce  parti qui est présent dans les institutions s’est absenté lors du vote de la révision constitutionnelle à l’APN où il aurait pu voter « non » ainsi qu’il appelle les Algériens à le faire lors du référendum. Le choix de l’absentéisme dans une assemblée où il est présent aurait, en toute logique, conduit à appeler les électeurs à s’absenter. Mais le MSP a choisi la voie qui déplait le moins à un pouvoir pour qui la participation au référendum est l’unique enjeu, ceux qui appellent à voter « non » étant plus acceptables que les boycotteurs. 

La piqûre de rappel Djaaboub

Le MSP est d’autant plus enclin à éviter la rupture que l’épisode de la désignation de Hachemi Djaaboub, membre au Majliss Echoura, au ministère du travail, vient rappeler qu’il existe un fort courant au sein du mouvement qui préfère la «participation» à l’opposition. Et aussi une capacité de manoeuvre du pouvoir au sein du mouvement puisqu’il se permet le luxe de débaucher un membre du Majliss Echoura sans que celui-ci ne prenne la peine de consulter son parti. 

 L’ancien président du MSP, Boudjerra Soltani, qui s’est offert une « ONG internationale» – qui a reçu un agrément sans aucun problème –  pour rester présent dans le champ , a ostensiblement «félicité » Hachemi Djaaboub pour sa désignation  et appelé à voter «oui » pour la révision de la Constitution. 

Comment être dans l’opposition sans rompre avec le pouvoir ou même en y participant ? La vieille stratégie « pragmatique » du MSP est toujours en œuvre même si elle s’adapte. Avec une perspective évidente, non pas de changer la donne avec le référendum sur la Constitution, mais de rafler le maximum aux prochaines législatives. Le « non » à la révision de la Constitution est donc un pré-positionnement politico-idéologique pour les législatives. 

Le MSP fait peut-être le calcul que les partis regroupés au sein du PAD refuseront, au vu de leur position actuelle, d’y participer et qu’il sera le parti “d’opposition” majeur face aux partis du pouvoir, le FLN et le RND, et leurs dérivés.

 Cette “realpolitik” du MSP se traduit cependant par la liquidation définitive de l’acquis de la conférence de Mazafran, celui de l’entente entre des partis de courants divergents voire opposés, sur un minimum commun pour le changement démocratique.

Dans un post publié le 11 octobre 2020, Abderezzak Makri, développe un discours ultra-complotiste à l’égard des supposés laïcs qu’ils soient de « droite ou de gauche » et dont le seul but ne serait que de« combattre les constantes » du pays, sa religion, sa langue, son histoire et ses valeurs. D’un trait de plume, ceux qu’il côtoyait à Mazafran, sont ramenés à n’être qu’une « cinquième colonne » des puissances coloniales et certains sont même des «agents sionistes ». 

L’adieu à la « wassatiya »

La liste est longue des méfaits et des sournoiseries qu’il impute à ceux qui sont dans un courant dont l’objectif est le « contrôle total, complet et éternel sur la prise de décision de l’État » et s’ils n’y parviennent pas, « ils menacent l’unité nationale. ».

Certes, le Majliss Echoura du MSP évite ces excès de langage dont Abderrezzak Makri a l’habitude dans ses posts, mais il est bien dans la ligne et cela donne une idée claire de sa volonté de rapprochement avec un courant d’extrême-droite émergent à l’Algérienne qui a développé, contre le Hirak, un discours haineux, ciblant en particulier la Kabylie. Certains pourraient d’ailleurs rappeler que l’AKP d’Erdogan, qui est une « référence » pour le MSP, gouverne avec l’appui de l’extrême-droite nationaliste turque.

Mais en essayant de flatter les « badissi-novembari » ou les « sektembari », qui ne sont pas de simples “défenseurs des constantes” mais développent un discours violent et par beaucoup de côté racistes, Makri prend le risque de nuire à l’image de la “wassatiya” dont le MSP se prévaut depuis Mahfoud Nahnah. Sans compter que les acteurs de ce courant ont leurs propres ambitions et pourraient être présents pour eux-mêmes lors des prochaines échéances électorales. 

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