Un porte-conteneurs géant, l’Ever Given, s’est retrouvé en travers du canal de Suez mardi lors d’une tempête de sable, et obstrue depuis l’une des voies navigables les plus fréquentées du monde.
Comment cela s’est produit?
Le navire de 400 mètres de long et de plus de 220.000 tonnes a dévié de sa trajectoire mardi. L’Ever Given –59 mètres de large et une soixantaine de haut avec son chargement– s’est alors mis en travers dans le sud du canal, près de la ville de Suez, bloquant toute navigation entre la Méditerranée et la mer Rouge.
Alors que des vents violents combinés à une tempête de sable avaient d’abord été pointés du doigt pour expliquer l’incident, les conditions météorologiques n’étaient pas la seule raison de l’échouement, a affirmé samedi le chef de l’Autorité du canal de Suez (SCA), l’amiral Ossama Rabie. « D’autres erreurs, humaine ou technique, ont aussi pu entrer en jeu », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à Suez.
Selon Bernhard Schulte Shipmanagement (BSM), la compagnie basée à Singapour qui assure la gestion technique du navire, les 25 membres d’équipage sont sains et saufs. Et il n’y a eu aucune pollution ni dommage sur la cargaison d’une capacité de plus de 20.000 boîtes (EVP ou TEU).
Quelles sont les conséquences?
Le canal voit passer, selon les experts, près de 10% du commerce maritime international. Près de 19.000 navires ont emprunté le canal en 2020, selon la SCA. Inauguré en 1869, le canal a depuis connu plusieurs phases d’agrandissement et de modernisation. Son percement a réduit drastiquement les distances entre l’Asie et l’Europe: 6.000 km de moins entre Singapour et Rotterdam par exemple. Le canal a déjà été obstrué par le passé, notamment pendant la crise de Suez en 1956 lorsque des navires ont été coulés par les autorités égyptiennes.
Plus de 300 bateaux –dont des cargos transportant du bétail vivant– étaient coincés aux deux extrémités du canal samedi soir, a précisé M. Rabie. Le blocage entraîne d’importants retards dans les livraisons de pétrole et d’autres produits, avec une répercussion sur les cours de l’or noir, en hausse vendredi. Les premiers effets concrets se font sentir: la Syrie a notamment indiqué samedi qu’elle avait commencé à rationner la distribution de carburants, face au retard de livraison d’une cargaison.
De son côté, la SCA a souligné que l’Egypte perdait entre 12 et 14 millions de dollars (10 à 11,8 millions d’euros) par jour de fermeture, tandis que la revue spécialisée Lloyd’s list estime que le porte-conteneurs bloque chaque jour l’équivalent d’environ 8,1 milliards d’euros de marchandises. Selon un rapport de l’assureur Allianz, chaque jour de blocage pourrait « coûter entre six et 10 milliards de dollars au commerce mondial ».
Afin d’atténuer les pertes, le géant du transport maritime Maersk et l’allemand Hapag-Lloyd ont indiqué qu’ils envisageaient de dérouter leurs navires pour passer par le Cap de Bonne-Espérance, un détour de 9.000 kilomètres autour du continent africain.
Que va-t-il se passer au Canal de Suez?
La SCA avait annoncé jeudi que le trafic maritime était « temporairement suspendu », la société mandatée pour le « sauvetage » du navire évoquant « des jours voire des semaines » avant sa reprise. Une opération de renflouement menée vendredi a échoué. Toutefois, M. Rabie a affirmé samedi que le navire avait « bougé de 30 degrés sur la droite et la gauche » pour la première fois, un « bon indicateur » de l’évolution des efforts pour dégager le navire.
En somme, il faudrait retirer de 15.000 à 20.000 mètres cubes de sable et atteindre une profondeur de 12 à 16 mètres pour remettre en circulation le navire, ont expliqué les autorités égyptiennes. « Nous pouvons terminer aujourd’hui ou demain, en fonction de la réaction du navire face aux marées », a également ajouté M. Rabie samedi.
Une marée haute prévue dimanche soir avec un important coefficient pourrait aider à débloquer navire.
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