Qui est le plus grand footballeur de tous les temps ? Longtemps la qualification faisait rage et alimentait les débats enflammés entre aficionados. Chaque partie y allait de ses arguments pour qui de Diego Maradona ou Pelé est le véritable récipiendaire de cette qualité.
Pourtant, tant dans leurs propriétés sportives que par leurs parcours respectifs le roi Pelé et le Pibe de Oro restent différents. Il faut dire que les deux footballeurs sud-américains de génie n’ont pas vécu la même période footballistique et les images de leurs exploits sur les terrains restent témoins d’époques distinctes. Un lieu tout de même les réunit : le Mexique, terre d’accueil des deux plus spectaculaires coupes du Monde de l’histoire, 1970 et 1986. Pelé et Maradona y auront brillé de mille feux, arrachant haut la main le sacre tant convoité, la coupe Jules Rimet pour le premier et celle de la Fifa pour le second.
La disparition subite de l’enfant prodigue et prodige de Buenos Aires ressenti avec une tristesse immense en Argentine et dans les pays du Sud notamment le place déjà au firmament. La différence entre Maradona et Pelé reste éminemment politique. Face à l’image trop lisse entretenue par le brésilien, l’enfant terrible de Buenos Aires était un personnage qui ne s’embarrassait guère d’afficher ses positions. De s’exposer avec Fidel Castro et Hugo Chavez, symboles de résistance à l’ordre établi, de dire ce qu’il pensait des États-Unis avec des mots singuliers.
De son côté, Pelé reste celui qui s’est affiché avec Nixon, Ford et Reagan. Devenu homme d’affaires, et même homme politique après sa fin de carrière, Edson Arantes perdra de son ancrage populaire.
Maradona, lui, même s’il en a aussi bénéficié, était critique du système Fifa. L’on se rappelle cette finale perdu en 1990 face à l’Allemagne ou il refusa de toucher la main à João Havelange alors puissant président de l’instance footballistique mondiale. C’est pourquoi Maradona semblait plus proche des cœurs des opprimés, des plus faibles face aux puissants. Les napolitains qui le considèrent comme l’un d’eux ne l’ont pas oublié en lui rendant un vibrant hommage.
Ses positions politiques affichées en faveur de Castro et Chavez et son animosité envers les États-Unis feront de lui plus qu’une icône sportive. « Il reste une icône parce qu’on aime les rebelles », dira de lui l’historien du sport Paul Dietschy. L’argentin restera à jamais malgré les frasques de l’homme une personnalité à part dans l’histoire du football mondial. L’écrivain uruguayen Eduardo Galeano qui écrivait le football mieux qu’on ne pourra jamais le faire disait : « Diego fut le sportif le plus populaire et le plus connu de tous les temps.
Cette idole généreuse et solidaire avait été capable de réussir, en cinq minutes, les deux buts les plus contradictoires de toute l’histoire du football. Ses dévots le vénéraient pour les deux. Les autres ne doivent pas seulement admirer le but de l’artiste, tricoté par les arabesques de sa jambe gauche, mais plus encore le but du voleur.
Maradona n’a pas seulement été admiré pour son talent, mais surtout parce que c’était un pêcheur. N’importe qui chez lui peut reconnaître la synthèse ambulante de la faiblesse humaine ». Diego Armando Maradona aura été de son vivant un personnage de roman. En plus d’avoir été un footballeur de génie, son parcours était celui d’un héros du petit peuple. Il était le meilleur de tous. Le plus grand footballeur de tous les temps.
