Saïd Hannachi de éditeur Media-Plus: «Le livre ne se vend plus comme avant »

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Saïd Hannachi éditeur de Media-Plus: «Le livre ne se vend plus comme avant"
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Média-Plus, maison d’édition et librairie de Constantine, bouclera ses 30 ans d’existence en 2021. Saïd Yassine Hannachi, son directeur, évoque les difficultés actuelles de l’édition.

24H Algérie: Quelle analyse faites-vous de la situation actuelle de l’édition ?

Saïd Hannachi: Nous traversons une période difficile, l’avenir de notre profession est réellement en jeu. L’activité a chuté durant ces dernières années et s’est aggravée suite à la pandémie de Coronavirus. Une situation insoutenable, une marge bénéficiaire faible,un chiffre d’affaires insignifiant et des problèmes de trésorerie… tout peut basculer ! La covid 19 a dévoilé surtout la fragilité du secteur de l’édition. Indépendamment de cette crise sanitaire, le livre ne se vend plus comme avant et les difficultés d’exercer sont multiples, identifiées dans l’ensemble mais accentuées à l’intérieur du pays.

Quel est l’impact du report de l’édition 2020 Salon international du livre d’Alger (SILA) sur votre édition ?

Le SILA reste incontestablement un grand rendez-vous culturel, son annulation pour des raisons évidentes de prévention sanitaire a eu certainement un impact négatif pour le public et l’ensemble des acteurs du livre. C’est une frustration pour les lecteurs, les auteurs et un manque à gagner pour les exposants. Pour notre part, nous n’avons pas participé au SILA depuis 2016 pour diverses raisons. Cette manifestation est trop coûteuse pour un éditeur de l’intérieur du pays. J’espère que la nouvelle équipe révisera la copie organisationnelle de cet important salon.

Faut-il organiser des salons nationaux ?

Toute manifestation livresque structurée et bien organisée est la bienvenue. Une bouffée d’oxygène pour les lecteurs des autres villes et une occasion de visibilité pour les jeunes maisons d’édition et aussi pour les jeunes auteurs. Une occasion aussi de bannir certaines « expo-ventes » de livres à l’année sans thématique et qui lèsent surtout le bon fonctionnement des librairies actives.

Comment l’État peut-il soutenir les éditeurs? Et comment améliorer la distribution des livres dans le pays ?

Nous avons quelques suggestions  comme l’achat de livres et aides à la publication aux éditeurs. Nous proposons la création d’un fonds exceptionnel d’aide pour soutenir financièrement les maisons d’édition en difficulté. Autres formes d’aide : accorder des prêts aux éditeurs et reporter le paiement des créances et différentes charges. La distribution de livres est un métier. Il faut encourager et accompagner celles et ceux qui s’investissent dans ce créneau par la création de structures efficaces de diffusion à côté des entreprises étatiques.

Vous êtes également libraire, la demande sur les livres est-elle aussi importante ?

A quelques exceptions, la demande en livres enregistre une nette baisse. « On achète » le plus souvent utile, pouvoir d’achat oblige. Le téléchargement d’ouvrages sur internet demeure un coriace concurrent à moindre coût. Si le livre édité localement reste accessible, la difficulté réside dans la disponibilité régulière des livres d’importation ou du moins ceux demandés par les lecteurs. Malgré toutes les difficultés rencontrées, la librairie Média-Plus de Constantine se distingue par ses nombreuses animations culturelles pour la promotion du livre et de la lecture.

Par exemple ?

Nous organisons périodiquement des rencontres, des débats, des signatures et un café littéraire en partenariat avec l’Institut français d’Algérie (IFA) de Constantine. Dans un passé récent, nous avons organisé « L’été en poche », une opération unique en Algérie. Chaque été, la librairie Média-Plus se transforme en une grande pochothèque : vente promotionnelle du livre de poche tous genres confondus. Et durant, le Ramadhan, nous organisons « Thé et pages nocturnes ». Il s’agit de rencontres, de signatures de livre et de thé gratuit à volonté. Pour nous, la promotion du livre et de la lecture demeure l’affaire de tous.

Avez-vous de nouvelles parutions ?

L’aventure de publier douze ouvrages par an n’a pas trop duré pour nous. Quelques titres seulement ont été édités en 2019 et en 2020. Plusieurs projets éditoriaux dont des livres de référence sur l’Algérie restent en attente de publication faute de moyens financiers, nous citerons entre autres : « Un guide culturel et touristique d’Algérie », un beau livre illustré et bilingue sur le combat des femmes engagées dans la lutte pour la libération de l’Algérie, ouvrage consacré aux femmes martyres de la Révolution ainsi qu’aux Moudjahidate de la ville de Constantine. Nous sommes pratiquement à l’arrêt, refuser des manuscrits faute de moyens financiers est frustrant pour nous et souvent très décourageant pour les auteurs.

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