Trois films à l’ouverture 18ème Rencontres cinématographiques de Béjaia : Entre mélancolie, tiraillements et inquisition

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Trois films à l'ouverture 18ème Rencontres cinématographiques de Béjaia : Entre mélancolie, tiraillements et inquisition
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Trois courts métrages ont été projetés à l’ouverture, samedi 23 septembre au soir à la cinémathèque, des Rencontres cinématographiques de Béjaia (RCB). 


L’association Project’heurts, qui organise l’événement, a voulu saluer le public des RCB en le considérant comme la véritable star de l’événement artistique. « Et nous avons décidé de dresser un tapis rouge pour ce public », a déclaré Hakim Abdelfettah, membre du comité artistique des RCB.  Un écran a été installé à la place du 1er novembre (ex-place Gueydon) pour permettre au public, qui ne peut accéder à la salle, de suivre les films.


Hakim Abdelfettah a parlé de la sélection de 33 films sur les 387 reçus, par le comité composé aussi de l’universitaire Latifa Lafer et du réalisateur et archiviste Nabil Djedouani.


Trois courts métrages réalisés dans la région de Béjaïa ont été projetés lors de la soirée d’ouverture pour s’inscrire dans la thématique des 18ème RCB, « le cinéma et la ville ». Thématique développée lors d’un débat organisé au Musée Bordj Moussa, ce dimanche 24 septembre, en présence de cinéastes et animé par la productrice Amina Haddad.


Trois destins

Présenté déjà lors de la Quinzaine des réalisateurs, au festival de Cannes, en mai 2023,  « La maison brûle, autant se réchauffer » de Mouloud Aït Liotna a été projeté pour la première fois en Algérie, en présence du jeune cinéaste. Tourné dans un décor réel dans un village de la région de Tazmalt en Kabylie, le court métrage évoque l’histoire mélancolique de Yanis (Mehdi Ramdani) qui se prépare à partir s’installer en France, fuyant une existence qui paraît douloureuse.


 Il apprend la mort de Lounis, un ami d’enfance, dans des conditions tragiques. Il livre ses sentiments à un autre ami (Mohamed Lefkir) qui travaille dans un champ pétrolier dans le sud algérien. Un ami en quête d’espaces comme s’il étouffait dans son village, pourtant verdoyant, en Kabylie.  


Trois personnages, trois destins. L’un meurt, l’autre veut partir et le troisième préfère vivre, ou peut être, errer dans le désert. L’Algérie est-elle devenue une terre si invivable ? Mouloud Aït Liotna évoque, sans trop convaincre, la question du déracinement. Un déracinement qui serait nourri par des images vues ailleurs, en Occident, selon ses dires.


Le film se déroule en hiver, dans une atmosphère austère, grise, comme pour exprimer les sentiments du jeune cinéaste débordant d’amertume, de déception, en évitant de justesse le pathos. Il y a peu de poésie dans un film contemplatif traversé de silences et alourdit parfois par des lenteurs.


S’embrasser librement

Moins élaboré, « Boussa » de Azedine Kasri raconte, comme son titre l’indique, une histoire de baiser impossible. Mériem (Anaïs Lazizi) et Réda (Mourad Boudaoud) s’aiment et peinent à trouver des moments d’intimité dans un pays où le regard « inquisiteur » ou « réprobateur » freine tous les élans dans l’espace public. Un regard qui serait partout, selon « la philosophie » du film.


Aussi, Mériem et Réda doivent-ils trouver une astuce pour pouvoir s’embrasser librement. « Boussa » est une comédie romantique où la caricature est dessinée à gros traits même si le plaidoyer n’est pas pour l’indécence. Azedine Kasri, Médéric de Watteville et Simon Serna ont écrit à trois un scénario qui n’échappe pas au regard « habituel » et stéréotypé sur une société non européenne, figée et hypocrite. Azedine Kasri rejette l’idée d’avoir versé dans le cliché.


« Un homme au chômage de mon entourage, qui devait se marier en Algérie, n’a pas pu payer la cérémonie de noces pour des considérations financières. Pendant une année, il n’a pas pu avoir une certaine intimité avec sa femme. C’est quelque chose qu’on voit ici. Il y a un certain étouffement. Ce n’est pas une critique, mais un constat réel. Il y a de l’espoir que la jeunesse contourne les obstacles pour pouvoir mieux appréhender le monde demain », a-t-il souligné lors du débat qui a suivi la projection.


Rester ou partir ?

« Rentrons » de Nasser Benssalah suit le parcours de Nouria (Melha Bedia) et d’Abdel (Zine-Eddine Benyache), deux jeunes issus de l’immigration algérienne en France, qui reviennent en Algérie. Abdel travaille dans le café de son oncle et cherche ses repères. Nouria, en désaccord avec son père, un père qui apparaît comme une ombre dans le film, entend reprendre le chemin du retour. Abdel et Nouria se déplacent en mobylette allant de la montagne à la mer, du vert au bleu, en passant par le jaune. Des décors bien filmés. Les deux jeunes personnes sont dans un tiraillement existentiel. Faut-il repartir ou rester au « bled » ? Une question qui semble devenir de plus en plus pesante au sein de la nouvelle génération des maghrébins de France face à l’émergence des courants d’extrême-droite et du discours interminable sur la migration.


Pour ses vingt ans, l’association Project’heurts a organisé une exposition de photos et de coupures de presse, visible au niveau de la cinémathèque de Béjaïa, et publié un catalogue, « Aho ciné », où l’histoire des RCB est racontée. Les RCB se déroulent jusqu’au 28 septembre 2023. 

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