Le président tunisien Kais Saïed a désigné, samedi, l’actuel ministre de l’Intérieur, Hichem Mechichi de former le prochain gouvernement « dans les plus brefs délais ». Hichem Mechichi a, au regard de la Constitution, un mois pour former son équipe et obtenir la confiance du parlement tunisien. Il succède à Elyes Fakhfakh, qui a démissionné le 15 juillet à la suite d’un bras de fer avec le parti Ennahda qui a mis en avant des soupçons de corruption et de conflit d’intérêt. Fakhfakh avait démissionné pour, selon les services du Premier ministre « éviter au pays des conflits entre institutions, afin de lui ouvrir un chemin nouveau pour sortir de cette crise ».
Né en 1974, Hichem Mechichi est titulaire d’une maîtrise en droit de la faculté de droit et des sciences politiques de Tunis et d’un master en droit, sciences politiques et administration publique de l’École nationale d’administration. Il a été membre de la Commission nationale d’investigation sur la corruption et la malversation, fondée en 2011. Début 2020, il a fait un très bref passage au cabinet de la présidence en tant que conseiller chargé des affaires juridiques avant d’être désigné, ministre de l’intérieur.
Coup de poker du président
Le choix de Kais Saïed ne tient pas compte des propositions des partis politiques que le président tend à dédaigner alors que dans le système parlementaire tunisien ils ont un rôle important. Le chef de l’Etat entreprend une partie de poker risqué : si Hichem Mechichi parvient à former le gouvernement, il aura pris un ascendant sur les partis représentés au parlement – et notamment Ennahda qui y détient 54 sièges sur 217 -, à défaut, il devra dissoudre l’assemblée et convoquer de nouvelles élections législatives.
Kais Saïed qui tend à se placer au centre du jeu a exprimé son animosité à l’égard des partis politiques qui, a-t-il dit en recevant Hichem Mechichi, samedi, font « perdre du temps » aux Tunisiens. Il a également critiqué, sans les nommer, ceux qui ont tenté « de nous embarquer dans une guerre civile ».
Kaïs Saïed avait choisi de manière ostentatoire d’aller dans la nuit du 21 juillet dans la caserne des forces spéciales pour lancer un avertissement à « à tous ceux qui veulent remettre en cause la légitimité, de l’intérieur ou de l’extérieur du pays, à ceux qui complotent de l’étranger contre la Tunisie, que les forces armées feront face à ces velléités. ».
Ghanouchi : je ne suis pas venu sur un char
Par ailleurs, le bureau de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a accepté vendredi 24 juillet, de tenir le 30 juillet prochain une plénière consacrée à la motion de retrait de confiance au chef du parlement Rached Ghannouchi qui avait été présentée par 73 députés. Rached Ghannouchi a indiqué qu’il était possible de recaler la motion pour la forme mais qu’il a accepté de relever le « défi en signe de respect à la volonté de 73 députés ».
« Il y a plusieurs défaillances dans cette motion [de retrait de confiance] et il aurait été facile de la refuser pour vice de forme, mais par respect à la démocratie tunisienne et aux 73 députés signataires, et pour prouver que le chef du Parlement n’est pas venu ici par un coup d’Etat, mais grâce au résultat des urnes, j’ai décidé que je ne resterai pas une heure de plus sans la volonté des députés », a déclaré Ghannouchi.