Sur les réseaux sociaux, Youcef partage des podcasts où il met en scène les difficultés de la jeunesse issue des quartiers populaires (Casbah, Bab El Oued Soustara). Face à sa caméra, il dénonce ces fléaux qui compromettent l’avenir des enfants de son quartier, la Casbah. Connu sur les réseaux sociaux pour son franc-parler, Youcef aborde les problèmes de la délinquance, l’émigration clandestine, la violence, l’habitat précaire, et il n’hésite pas à hausser le ton. Certains de ces podcasts avoisinent les dix millions de vues.
Sa page Facebook intitulé « DZ Casbah MSG », est suivi par 98 mille abonnés et sa chaine Youtube « YOucef On » compte 188 mille followers. Ce jeune homme de 27 ans, s’est lancé dans la production de vidéos en 2017. Son objectif : déconstruire les clichés sur la jeunesse des quartiers populaires et montrer à un large public l’adversité qu’ils surmontent au quotidien.
«Je montre ce que je vois dans mon entourage propre. J’ai grandi dans un quartier en ruine à la Casbah où plusieurs familles étaient entassées dans de petites pièces délabrées qui faisaient office de maison. Donc je parle de la pauvreté, de ces jeunes qui traversent la mer au péril de leur vie, de ceux qui se réfugient dans les drogues et bien d’autres. D’une autre part, je montre comment on s’est sort malgré l’adversité. Que nous les enfants des quartiers chauds, nous avons des rêves et nous sommes de bons citoyens » affirme Youcef.
La vidéo qui a été visionnée par sept millions de personnes s’intitule «quand vient la fête de la rupture du jeûne et pleure l’orphelin ». Elle montre des enfants qui discutent la veille de la fête de l’aïd à propos des habits neufs. Certains ont les moyens d’avoir des vêtement neufs, d’autres non.
«Cette vidéo a particulièrement ému les gens. Je l’ai réalisée avec les enfants de la vieille citadelle. Cette réalité nous la connaissons tous. Ces fêtes sont difficiles à surmonter pour les plus démunis. C’était une manière de promouvoir l’entraide et le partage dans notre société » explique Youcef.Il se fait également remarquer par une vidéo dédiée aux victimes de l’effondrement de l’immeuble de la Casbah en avril 2019.
Aujourd’hui Youcef habite dans un vieux lycée à Soustara. Il vit avec sa mère et sa sœur dans un immeuble qui menace de s’effondrer. Depuis les dix mètres carrés de sa chambre, il s’adresse à ses milliers d’abonnés. Les débats qu’il engage avec sa communauté, portent souvent sur les fléaux de la société qu’il estime plus répandus dans les quartiers populaires.
L’influenceur de Soustara, traite de tous les problèmes sociaux
«On parle de la consommation de drogues, des projets d’émigration clandestine, de la violence. Certains témoins ou victimes viennent raconter ce qu’ils ont vu ou subit. Cela nous permet de nous informer de ce qui se passe dans nos quartiers et de nous mobiliser pour apporter de l’aide à ceux qui en ont besoin » souligne-t-il.
Mais pour Youcef l’objectif premier de l’utilisation des réseaux sociaux est de se faire entendre. Qu’il s’agisse des habitations en péril, des jeunes qui sombrent dans la délinquance, les familles au bord de la famine, tous ces problèmes persistent et ne sont pas résolus.
«J’ai été récemment contacté par un jeune de la Casbah dont la maison à complètement été inondée après de fortes intempéries. Il me demandait de publier sur ma page un message pour alerter les autorités. La publication a atteint au bout de quelque jours deux millions d’abonnés. Après une semaine, ils ont été relogé » raconte fièrement Youcef. C’est pourquoi il considère les réseaux sociaux comme un moyen d’exister. Une manière de porter ces petites voix de la société.
Pour lui, le métier d’influenceur en Algérie fait souvent rêver avec ces jeunes qui se répandent davantage sur Youtube et Instagram pour montrer souvent un mode de vie plaisant. Il se souvient de ses débuts, il dit qu’il a été vivement critiqué, car on lui reprochait de parler de chose qu’il ne connaissait pas. Il explique que les internautes associaient l’influence à une certaine image de marque.
«Je suis moi-même issue d’un milieu défavorisé. J’ai moi-même été exposé à tous les problèmes que j’évoque avec ma communauté. Je voulais que ces jeunes en difficultés s’identifient à moi et puissent me parler. J’estime que j’ai été chanceux car j’ai su me prémunir des idées noires et des pensées négatives. Il a donc fallu raconter mon histoire pour que les gens me fassent confiance » se souvient Youcef.
Apprécié des jeunes de son quartier et au-delà, Youcef prend à cœur son rôle d’influenceur. Il aimerait développer davantage sa passion pour la production et réaliser de courts-métrages, sans changer le caractère engagé de ses films. Il aimerait également que les autorités concernées s’occupent de cette jeunesse pleine d’espoir. Mais cela est une autre histoire